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et l’héroïsme des soldats. D’aucun récit de la bataille de l’Yser, il ne se dégage non plus l’impression que le principal rôle y ait été joué par les « machines, » et c’est une impression toute contraire, — nous n’avons pas besoin de le rappeler aux lecteurs de cette Revue, — que nous laisse l’émouvant Dixmude de M. Charles Le Goffic. Et la résistance de Verdun, — dont M. Henry Bordeaux, également ici même, nous a retracé avec une si grande force d’évocation, les épisodes plus dramatiques peut-être, les Derniers jours du Fort de Vaux, les Captifs délivrés, — est-elle autre chose que la résistance même de nos troupes, la ténacité de leur résolution sublime, formulée dans le fameux : « Ils ne passeront pas ? » Héroïsme des soldats, intelligence des chefs, ces deux facteurs essentiels de la guerre ne cessent d’en dominer les opérations : tout le reste ne représente que des instrumens à leur service. Si les ingénieurs font leur œuvre propre en inventant de nouveaux engins, ceux-ci ne sont rien en dehors de la pensée qui les utilise, coordonne tous ces moyens pour la défensive ou l’offensive, marque leur place dans une action d’ensemble et les fait servir à une fin calculée, voulue. M. Wells ne considère que quelques-uns d’entre eux et oublie les autres. Il oublie surtout l’art qui les fait servir les uns et les autres à une même fin, — l’art de la guerre, qui reste bien distinct de l’industrie.


Des caractères de cette guerre nouvelle, guerre atroce, à la moderne, M. Wells remonte tout naturellement à ses causes, aux véritables responsabilités : il y voit avec une parfaite clarté l’intention et le crime de l’Allemagne, le chef-d’œuvre de sa préparation, de sa préméditation. Tragédie et sacrifice pour la plus grande partie du monde, elle n’est pour les Allemands que la catastrophe où devait aboutir la folie soigneusement entretenue pendant cinquante ans, la conclusion de leur militarisme et de leur Welt Politik. « Qu’aurait-il pu arriver d’autre que cet effroyable désastre, avec Michel et son infernale machine de guerre au centre de l’Europe ? » En face de ce colosse malfaisant, de ce monstre armé par l’industrie moderne, les Alliés représentent le suprême effort de la civilisation occidentale pour se sauver et sauver le monde de la domination de l’impérialisme allemand réactionnaire qui s’est asservi les ressources