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On le voit, les erreurs sont reconnues, les fautes relevées et surtout les prescriptions les plus précises tracées d’une main ferme. Artillerie, cavalerie, infanterie sont immédiatement dirigées sur les voies de la nouvelle guerre. En trois jours, les perspectives futures, même encore éloignées, sont dégagées.

Il n’est pas un officier ou un homme ayant assisté aux journées ultérieures qui n’ait reconnu le profond changement qui se produit, notamment dans l’emploi de l’artillerie et sa liaison avec l’infanterie. Le canon de 75 prend, soudain, toute sa valeur. L’armée est, pour ainsi dire, remise en selle.


Cependant les troupes sont encore dans le moment le plus critique de leur retraite vers le territoire français. Que dis-je ? le territoire français est violé en Lorraine jusqu’à Lunéville et au-delà, dans la région des Ardennes jusqu’à la Meuse, dans le Nord jusque vers Le Cateau et Rocroi. Sans que l’ordre général soit compromis, c’est le désarroi qui accompagne inévitablement ces flux et reflux d’armées immenses reculant soudain par les routes où elles avançaient la veille ; sauf dans l’Est, où s’organise la première résistance pour la défense de la Trouée de Charmes, les choses, sur l’ensemble du front, restent confuses. Où va-t-on ? Que doit-on faire ?

De partout, on attend la parole qui apportera la lumière, donnera aux événemens un sens, la volonté qui créera un ordre nouveau, et, pour employer le terme technique, qui ressaisira L’INITIATIVE STRATEGIQUE.

Cette parole ne se fait pas attendre. Le 25 août 1914, à 22 heures, part du Grand Quartier Général, « l’Instruction générale n° 2, » adressée par le commandant en chef aux commandans d’armées, et qui va saisir et modeler cet état de choses presque désespéré pour lui donner à bref délai l’aspect et la figure de la victoire…

Un des généraux qui commanda certaines des journées les plus glorieuses de cette guerre a raconté ceci : il avait reçu l’ordre de se rendre rapidement d’un point à un autre du front pour exercer un nouveau commandement. Accompagné d’un seul officier, il gagne à toute vitesse le poste qui lui était assigné. Au lieu dit, il voit passer une troupe confuse de soldats de toutes armes, accablés de chaleur et de fatigue, marchant sans ordre et sans tenue sur les routes de la retraite. Or, il lit,