Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 41.djvu/602

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans le pavillon qu’on leur préparait au bois charmant de Wassenaar ; mais le Comité qui avait gracieusement offert la présidence d’honneur à une Française était purement hollandais, composé de dames toutes Hollandaises de naissance, groupées autour de Mme la baronne Taets van Amerongen-Viruly ; et il déployait dans son action la généreuse jalousie de sa belle initiative. Depuis, ces comités et ces œuvres d’enfans français se sont multipliés, à un degré qu’il ne convient pas que la France ignore.

Ardeur de charité, ardeur de dignité. L’une est génératrice de l’autre. Le peuple hollandais, qui paraît d’abord froid et gourmé, cache sous ces apparences une chaleur de sentiment et une passion incroyables. Aucune âme, je crois, n’est plus indépendante que la sienne. Sûr d’un écrasement bien plus rapide encore que celui de la Belgique en cas d’invasion, ce pays n’en a pas moins fait tous les gestes nécessaires pour la sauvegarde du sol national, de ce sol qui est lui-même une patiente victoire sur les élémens, sur les oppressions historiques. Malgré la grande nappe d’intérêts commerciaux qui a un peu, dans certaines villes d’affaires, noyé certaines de ses traditions et brouillé parfois les traits de sa physionomie, il a gardé sa conscience protestante, et il est imployable à la loi du plus fort. En voyant manœuvrer cette armée toute fraîche, improvisée depuis août 1914, et de bonne allure, ma foi, sous son uniforme réséda ; devant toute cette civique application qu’une simple batterie d’artillerie lourde, du côté adverse, eût réduite à néant, je retrouvais en action le mot célèbre du Taciturne : « Point n’est besoin d’espérer pout entreprendre, ni de réussir pour persévérer. » Et j’ai réprimé un sourire trop facile devant certaines tranchées creusées par des novices, ou devant ces fils barbelés, plantés en pleins étangs, où se jouaient les sarcelles des chasses gardées.

Courage d’opinion enfin, et qui s’exprime à la hollandaise, c’est-à-dire sans violence, mais avec une ferme liberté. La presse n’est jamais « déchaînée, » aux Pays-Bas, parce, qu’elle n’est pas enchaînée. Ou, si elle se déchaîne un peu, les tribunaux interviennent, et parfois avec une dureté qui a soulevé des protestations contre les condamnations d’un rédacteur du Telegraaf. Au fond, pays de tolérance et de libre examen, fidèle