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principes du régime que nous avons organisé dès le premier jour de la réoccupation des régions libérées. C’est, avant tout, un régime de transition, destiné à préparer le retour des autorités préfectorales et municipales. L’emploi des moyens militaires est destiné au rétablissement progressif des autorités administratives. Nous sommes en campagne, face à l’ennemi. Nous ne perdons pas de vue notre but principal. Nous voulons qu’à proximité des lignes, notre action militaire prépare le moment où le territoire reconquis sera rendu tout entier à son régime normal…

Tandis que ces explications me sont données en termes d’une clarté très précise, l’auto traverse, à vive allure, l’étendue de pays dévasté qui sépare Noyon de Roye. La route est toute droite. Sur les tronçons des arbres centenaires qui bordaient d’une double rangée de branches et d’ombrages la chaussée rectiligne, et qui ont vu passer le grand Condé allant vaincre les Impériaux à Lens, un reste de sève a fait pousser des feuilles vertes. La verdure a reparu partout dans la plaine. Les foins, coupés par des équipes de soldats et de civils, ont été fanés par les femmes des villages voisins. Les habitans commencent à rentrer çà et là, dans les secteurs Oise-Nord et Somme-Ouest. 300 habitans sont revenus à Sermaize ; 392 à Lagny ; 208 à Candor ; 180 à Ecuvilly ; 24 à Margny-aux-Cerises ; 32 à Champien. Mais Roiglise, commune située à trois kilomètres de Roye, n’a récupéré qu’un seul chef de famille, M. Thiébaut, agriculteur.

L’agriculture était, avant la guerre, l’occupation presque unique des habitans de la commune de Roye. En effet, sur les 1 555 hectares que contient la superficie de cette commune, 1 469 étaient cultivés en froment, avoine, luzerne, sainfoin, seigle, fourrages annuels, betterave à sucre. Les jardins et les vergers occupaient 64 hectares. Dans toute la commune, il n’y avait pas une friche. Il s’agit maintenant d’effacer les traces de l’invasion dans cette commune agricole, qui fut si prospère. C’est une rude tâche, et qui demandera des années de labeur., Roye, qui comptait avant la guerre 4 515 habitans, n’en a plus que 850, le reste ayant été refoulé par l’invasion ou emmené en captivité par les envahisseurs. Les industries agricoles ont été détruites par les Allemands qui, au moment de leur retraite, ont inutilisé savamment, par un sabotage méthodique, tous les