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veulent en tirer des principes d’action. Et cela est si vrai que les crimes de la Terreur, même parmi les politiciens, ne rencontrent pas beaucoup d’apologistes ; on les excuse, on les explique, on ne les glorifie pas ; on se défend bien de vouloir les renouveler. Et de même, y a-t-il, parmi les « réactionnaires, » beaucoup de gens disposés à admettre que tout était mauvais, radicalement mauvais, dans l’œuvre de la Constituante, de la Législative, ou même de la Convention ? Il suit de là qu’à déclarer bruyamment la guerre à la Révolution, on risque, — et surtout dans nos assemblées politiques contemporaines, — de paraître condamner « en bloc » et sans nuances toute une série de faits désormais acquis à l’histoire, et dont les conséquences, quoi qu’on fasse, conditionnent désormais toute action durable ; on s’expose, de gaité de cœur, à l’impopularité, à une impopularité inutile ; on s’aliène peut-être des sympathies toutes prêtes ; on compromet, on laisse envelopper dans une commune défaveur bien des idées justes, bien des initiatives heureuses ; et, au total, on renfonce dans leurs préjugés hostiles des adversaires que peut-être aurait-on pu, sinon convertir, du moins éclairer et ébranler.

C’est ce qui est arrivé à Albert de Mun Et comme s’il se plaisait à accumuler les difficultés, sa foi « contre-révolutionnaire » avait d’autant moins de chances d’agréer aux majorités parlementaires de la troisième République, qu’elle s’est longtemps accompagnée et fortifiée d’une agissante foi monarchique. Au mois de novembre 1878, défendant à la Chambre son élection et son programme politique, religieux et social, il s’écriait : « La Révolution n’est ni un acte, ni un fait ; elle est une doctrine sociale, une doctrine politique qui prétend fonder la société sur la volonté de l’homme, au lieu de la fonder sur la volonté de Dieu, et qui met la souveraineté de la raison humaine à la place de la loi divine… Voilà le mal, et il ne sera guéri que par un retour aux principes contraires : c’est là, dans ce grand travail de réforme sociale, qu’est la contre-Révolution, et voilà l’idée, voilà la cause que nous servons dans l’Œuvre des cercles catholiques d’ouvriers. » À cette occasion, le comte de Chambord écrivait à l’orateur pour lui adresser ses félicitations, et, lui parlant de ses « chers ouvriers, » il ajoutait : « Qu’ils sachent bien que, moi, je les aime trop pour les flatter, et, pour tout dire en un mot, répétez-leur bien sans cesse qu’il