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Il est vrai qu’il s’appuyait surtout sur l’attribution des prix Nobel. Mais, reconnaissant de lui-même que cette base était insuffisante, il élargissait la question, et concluait ainsi : « La France a possédé et possède encore une place aussi prépondérante dans les sciences physico-chimiques que dans l’histoire naturelle, dans la littérature, dans les beaux-arts et dans la culture en général. » Si objectif et « statistique » que fût cet hommage, il fut doux à nos oreilles françaises. Le ministre de France, dans un speech plein de grâce et de verve, le releva après nous, et nous ne partîmes point sans laisser, là aussi, des amitiés.


SECOND SÉJOUR A CIIR1STIANIÀ, ET RETOUR EN FRANCE

23 mai-8 juin.

Le lendemain 22 mai, je prenais congé du groupe dévoué qui nous avait secondés dans notre campagne pour la France, et auquel était dû pour une large part le succès du banquet de la veille : M. Paul Desfeuilles, M. Edmond Carlson, M. Mohne, M. le pasteur Serfass, et une amie française qui acclimate l’esprit et la langue de chez nous au bord de Ström, tant par sa vive conversation que par ses traductions excellentes d’ouvrages suédois en français[1]. Et ces derniers échanges de sympathique gratitude sont tels que, du coup, j’oublie mes bagages…

Quinze ou seize heures après, me voilà à Christiania, foulant à nouveau la rue Charles-Jean où roule plus que jamais, à toute heure du jour et de la nuit, un flot de population animée. Car il n’y a presque plus de nuit maintenant, rien que deux ou trois heures de moindre clarté. Cette lumière ininterrompue est comme l’ivresse septentrionale : elle détermine un état de joie, d’excitation continue, qui se traduit en Norvège par une recrudescence de la vie sportive, et des couleurs encore plus vermeilles répandues sur tous les visages. Jeunes gens et jeunes filles portent en ce moment la tenue voyante des examens conquis à l’Université : tout dit la force, la jeunesse, la gaîté. On sent ce peuple vivace, né d’hier à l’industrie et à la richesse,

  1. Mlle Stephana Harel a traduit, outre certains ouvrages techniques, le livre de M. Andréas Lindblom sur La peinture gothique en Suède et Norvège, publié par l’Académie royale de Stockholm ; — elle prépare en ce moment la traduction de La Grèce préhistorique, du savant M. Montélius.