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entre les cellules à conserver d’une part, les cellules mortes et les germes de l’autre, de séparer, en un mot, le bon grain de l’ivraie ?

Des recherches systématiques le conduisirent par élimination à choisir, comme correspondant le mieux à cet idéal, la solution d’hypochlorite de soude convenablement neutralisée par l’adjonction d’autres sels, suivant la technique de Dakin, de façon à en supprimer les propriétés irritantes.

Ce liquide a les propriétés suivantes :

1° D’une part, une action destructive indiscutable, quoique pas très énergique, sur les microbes.

2° Il dissout rapidement les caillots, les débris mortifiés des tissus, tous les déchets cellulaires qui favorisent la pullulation des microbes et font obstacle à l’action de l’antiseptique.

3° Il agit mécaniquement sur la détersion de la plaie, c’est-à-dire sur la séparation progressive des tissus qui doivent disparaître et ceux qui doivent être conservés et entre lesquels la barrière leucocytaire s’interpose, comme une ligne de tranchées entre les territoires ami et ennemi.

4° Enfin, tandis qu’il dissout les élémens mortifiés, il favorise au contraire le bourgeonnement des tissus vivans de la plaie.

Aucun antiseptique connu, — celui de Mencière excepté, — ne possède à un même degré l’ensemble équilibré de ces diverses propriétés.

L’œuvre de Carrel a consisté non pas seulement à choisir comme agent antiseptique le liquide de Dakin, mais surtout à le mettre en œuvre par des procédés efficaces et puissamment originaux.

Ce liquide a un pouvoir microbicide faible ; d’où la nécessité, si on veut qu’il soit agissant, de le renouveler fréquemment, et de multiplier son action en la répétant. C’est ainsi que Carrel a été amené à irriguer d’une façon continue la plaie qui doit être humectée d’un liquide sans cesse renouvelé, lequel sans cela cesserait rapidement d’être stérilisant.

Sitôt donc le débridement, et l’extraction des corps étrangers chirurgicalement effectués, ainsi que nous avons dit, Carrel installe son appareillage qui va réaliser un nettoyage chimique continu de la plaie.

Des tubes de caoutchouc ou des drains multiples, divergeant d’une canule à plusieurs orifices, reliée elle-même à un réservoir d’alimentation contenant le liquide, sont placés dans la plaie et entourés de tissu éponge, de façon à baigner constamment toutes les parties de la plaie, d’ailleurs recouverte de compresses. Le