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Comme il n’a pas été fait usage du plan sans les Anglais, et qu’il pourrait resservir à l’occasion, on comprendra que je m’abstienne de toute précision à son endroit. Il suffira d’indiquer que des escadrilles de torpilleurs et de sous-marins devaient former barrage aux étranglemens de la Manche, couverts par nos croiseurs qui se tiendraient prêts à attaquer tout détachement ennemi avec lequel ils pourraient se mesurer sans trop de désavantage. Tactique du reste renouvelée de celle que les Anglais employèrent dans les mêmes parages, contre l’ « invincible Armada » de Philippe II.

Or, le 2 août, vingt-quatre heures après que l’Allemagne eut déclaré la guerre à la Russie, et vingt-quatre heures avant qu’elle l’eût déclarée à la France, nous ne savions pas encore à quoi se déciderait l’Angleterre. Et-comme ses hésitations ont déterminé les instructions que la Deuxième escadre légère reçut à la dernière minute, nous profiterons de ce qu’il est aujourd’hui possible d’en dire un peu plus long qu’auparavant, pour résumer les tractations entre Paris et Londres jusqu’au moment où la Grande-Bretagne vint, loyalement et résolument, nous apporter le renfort de toute sa puissance. La chose offre d’autant moins d’inconvéniens qu’elle démontrera une fois de plus que, loin de songer à devancer qui que ce soit sur le sentier de la guerre, la France et l’Angleterre ne s’étaient malheureusement pas assez entendues contre les entreprises des plus enragés ennemis de la paix du monde.


Ce qu’on appelait « Entente cordiale » ne consistait, à tout prendre, que dans un échange de conversations au cours desquelles les deux gouvernemens s’étaient préoccupés de ce qu’il conviendrait de faire dans l’hypothèse, de plus en plus à redouter, où l’Allemagne nous provoquerait. A cet effet, les états-majors généraux avaient reçu mission de jeter les grandes lignes d’une action combinée, ne comportant d’ailleurs que des mesures exclusivement défensives, comme nous aurons bientôt occasion de le constater.

En passant, il ne sera que justice de rappeler que c’est à la sage prévoyance, à la sollicitude patriotique de M. Poincaré, alors président du Conseil, que nous devons ces prémisses de l’alliance qui, par la suite, a si utilement contribué au salut mutuel.