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cette pensée était bien celle des ennemis de l’Empire : le second point de leur programme est en effet la conséquence logique du premier.

Que la résistance au Kulturkampf soit la dernière réaction violente de l’ancienne Allemagne française contre des maîtres abhorrés, cela se marque bien plus encore pendant les années où le conflit va atteindre son maximum d’intensité. Après les incidens d’Emmerich, après l’émeute d’Essen, pendant-laquelle le sous-préfet est lapidé, et dont le gouvernement ne se rend maître qu’au bout de quarante-huit heures, grâce à l’intervention de huit compagnies d’infanterie, les esprits se montent sur la rive gauche du Rhin, où le schisme vieux-catholique est considéré comme une véritable trahison, et l’effervescence revêt un caractère anti-prussien très accentué. Le peuple, raconte Sybel dans son discours au Landtag du 8 mai 1874, est persuadé que Bismarck va fermer toutes les églises le 15 du même mois et qu’il emprisonnera aussitôt les catholiques qui refuseront de se faire protestans : mais dans le cercle de Sarrebrück, l’opinion se console, car on sait de source certaine que, quinze jours après, les Français arriveront et rétabliront lav religion dans ses droits : cet heureux événement doit se produire exactement le 1er juin. Dès 1872, la population rhénane a manifesté contre la fête commémorative de Sedan, et, le 2 septembre, le clergé a organisé des processions pour protester contre les réjouissances prussiennes. En 1874, après que te Centre a voté contre la loi militaire présentée au Reichstag, le mouvement anti-impérial et francophile éclate avec une vigueur inattendue.

Cette fois, ce sont les évêques qui commandent, et on leur obéit. Ils défendent aux fidèles de célébrer la victoire remportée sur la France, sur la vieille protectrice qui seule représente le salut. Le 9 août, a Mayence, Ketteler publie sa Circulaire concernant la fête de Sedan : « Le parti qui en est l’inventeur, écrit-il, est celui-là même qui mène le combat contre le christianisme et l’Église catholique. Si donc il exige avec une impétuosité particulière que la religion, cette religion dont il se montre par ailleurs peu soucieux, participe à la cérémonie, il est évident qu’il ne le fait pas par piété. Il célèbre ainsi bien moins les succès du peuple allemand sur la France que ses propres succès sur l’Église catholique. Il veut la contraindre à