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voici que des protestations s’élèvent contre cette modification aux mesures envisagées à Londres, où l’on avait conçu cette action comme devant être subordonnée à une menace effective des troupes royales. De nouveau des craintes se font jour : la guerre civile ne va-t-elle pas éclater en Grèce ? Les Venizelistes, les sujets des Puissances alliées ne seront-ils pas massacrés dans la capitale ? Peut-être vaudrait-il mieux, pour éviter tous ces risques, atténuer un peu la rigueur des premières décisions, et, au lieu d’exiger l’abdication du Roi, se contenter de son éloigneraient pour la durée de la guerre ?


L’ABDICATION DU ROI

L’instant est décisif. Si M. Jonnart faiblit, s’il écoute ces plaintes, s’il cède tant soit peu à ces suggestions, le succès de l’opération est compromis. Toute hésitation permettra à Constantin de gagner un temps précieux, d’amuser le tapis par des négociations où il est passé maître, de s’en tirer par des engagemens et des promesses qui auront le sort des promesses antérieures. L’Entente n’aura à enregistrer en Grèce qu’un échec, qu’une reculade de plus.

Cette fois, l’échec sera particulièrement grave, parce qu’il sera public, patent, connu de tous. Nul ne pourra ignorer que toutes les dispositions avaient été prises, que les troupes avaient été embarquées et qu’au dernier moment, par manque d’accord entre les Alliés ou par crainte des conséquences, on a purement et simplement reculé.

Heureusement, M. Jonnart est inébranlable. On l’a chargé d’obtenir l’abdication de Constantin : il est résolu à remplir cette mission coûte que coûte. L’opération a été préparée : elle s’exécutera à la date fixée. Des retards, des délais ne serviraient qu’à tout gâter. Seulement, pour prouver à quel point il est respectueux des décisions prises à Londres, pour établir qu’il ne les modifie que dans la mesure strictement indispensable, il se résout, après réflexion, à suspendre de vingt-quatre heures l’une des deux actions projetées, à savoir : le débarquement de nos troupes au Pirée. L’autre, l’occupation de l’isthme de Corinthe, est absolument nécessaire, car elle prive Constantin du secours de son armée. M. Jonnart donne ainsi le meilleur gage de ses dispositions conciliantes. Il fera tout ce qui