Derrière le crochet défensif que forment, d’Asiago à la Piave, en se prolongeant par le massif du mont Grappa, les deux gradins du plateau des Sept Communes, et le cours inférieur du fleuve, de Valdobbiadene ou de Vidor à la mer, la bataille, pendant quinze jours, a été comme stationnaire. Stationnaire, mais non immobile ; les assauts se sont succédé vague par vague, en général repoussés et aussitôt suivis de contre-attaques. Remise du grand désordre engendré par le premier choc, et quoiqu’elle eût subi en hommes et en matériel des pertes dont il n’y a pas à dissimuler la gravité, sans compter cette diminution du moral des troupes que les chiffres ne mesurent ni n’expriment, mais qui heureusement n’a pas duré, l’armée italienne a fait tête, et l’avance austro-allemande a été suspendue. Ce peuple, qui sent si vivement, a donné, dans leur ordre naturel, toutes les réactions opposées qu’on devait attendre de lui. Maintenant, l’orgueil ou la fierté, et la haine séculaire du Tedesco, non plus seulement de l’Austriaco, sont entrés en ligne. Les renforts anglais et français sont arrivés à pied d’œuvre. Mais, depuis une semaine, on signalait de fortes concentrations ennemies, notamment dans le val Sugana, entre Trente et Rovereto, et de petites actions se sont produites, au-delà du Pasubio, sur la rive orientale, et même jusque sur la rive occidentale du lac de Garde, jusque dans les Giudicarie. Or, du Val Sugana, la Brenta, coupant le plateau des Sept-Communes, conduit à Padoue par Bassano; l’Adige est la voie qui descend de Trente et de Rovereto sur Vérone ; et, par la Giudicaria, l’on débouche dans la région de Broscia. Ce sont des routes à surveiller. Il ne faudrait pas que le mouvement tournant, commencé vers les sources de l’Isonzo, se continuant et se développant toujours plus à l’Ouest, vînt menacer d’une prise à revers l’armée italienne et les contingens alliés. La violence persistante des attaques sur Asiago donne à réfléchir ;