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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/327

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vapeurs de 4 000 tonnes jusqu’à Braïla, où ne s’aventuraient autrefois que des voiliers d’un faible tirant d’eau. La commission s’est signalée comme une des institutions les plus utiles et les plus originales que nous ait léguées le XIXe siècle. Mais aux Portes de Fer, et même avant qu’on soit sorti des eaux roumaines, apparaît l’esprit tracassier et intéressé des Hongrois dans l’imposition de taxes spéciales pour l’usage d’un chenal, qui a été creusé à grands frais par des ingénieurs moins expérimentés que ceux de la commission. Ces taxes et les règlemens fluviaux qui les édictent sont en contradiction avec le droit public européen et tout à l’avantage du commerce hongrois.

La Roumanie, puissance riveraine et souveraine, avait depuis le traité de Berlin son délégué parmi les autres commissaires. Elle s’est opposée obstinément à la régularisation de la navigation de Braïla aux Portes de Fer, stipulée par l’article 55 dudit traité, parce que les différens projets élaborés à ce sujet livraient à l’Autriche-Hongrie, non riveraine de cette partie du fleuve, le contrôle des ports et la police fluviale dans les eaux roumaines. Elle fit encore la sourde oreille en 1909, quand le baron d’Aehrenthal l’invita, comme grande amie de l’Autriche, à se prêter à une modification des traités relatifs au Danube, c’est-à-dire en réalité à une réorganisation, en dehors des autres Puissances, de son régime politique. Si le cabinet libéral, dirigé alors par M. Ionel Bratiano qui faisait ses débuts comme Président du Conseil, avait cédé à l’appel de cette voix insidieuse, l’Empire dualiste aurait complété son succès diplomatique sur la Serbie en s’érigeant en maître dans les affaires danubiennes. Maintenir la liberté du commerce et de la navigation sur la voie fluviale qui fait communiquer le centre et l’orient européens s’imposera aux négociateurs de la paix générale. Mais une reconstitution de la commission du Danube ne semble possible qu’avec des garanties sérieuses contre les empiétemens de l’Autriche-Hongrie et de sa complice.


IV

Le domaine où l’influence de Carol Ier s’est le plus directement affirmée est la politique extérieure. C’était, si l’on peut dire, sa chasse réservée, les chefs des deux partis, aussi bien que les classes dirigeantes, s’en remettant pour la conduite dés