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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/411

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n’avait pas craint d’intervenir directement dans la campagne électorale. Ses agens avaient répété au peuple que voter pour Venizelos, c’était voter contre le Roi, c’était rendre inévitable la guerre et par conséquent la ruine de la Grèce, etc. En dépit de cette furieuse propagande, M. Venizelos avait obtenu la majorité. Trois mois plus tard, le Roi le chassait du pouvoir et renvoyait la Chambre parce que tel était son bon plaisir.

Une telle dissolution, arbitraire, anticonstitutionnelle, les Puissances protectrices avaient le droit et le devoir de la tenir pour inexistante, d’exiger en conséquence la convocation de cette Chambre de 1915, dissoute illégalement.

C’est cette demande que le Haut-Commissaire, d’accord avec M. Venizelos, allait présenter à M. Zaïmis. M. Venizelos demandait en outre la révision de la Constitution dans un sens plus démocratique, afin de rendre impossible le retour de pareils attentats ; la suspension de l’inamovibilité de la magistrature, pour être en mesure de punir tous les abus de pouvoir qui avaient été commis.

M. Zaïmis, — et M. Jonnart ne l’ignorait point, — n’était pas disposé à souscrire à toutes ces demandes. Il comptait offrir sa démission. Fallait-il l’accepter maintenant ou bien le prier de garder le pouvoir quelque temps encore ? Le moment était-il venu pour M. Venizelos de rentrer dans la capitale ? Telles étaient les questions qui exigeaient de M. Jonnart une décision immédiate.

Le calme et la tranquillité avaient été rétablis dans Athènes beaucoup plus vite qu’on n’aurait pu le supposer. Toutes les fois que le Haut-Commissaire se rend dans la capitale, il y reçoit l’accueil le plus respectueux et le plus sympathique. Des délégations de commerçans et d’étudians, des corporations ouvrières viennent l’acclamer au Pirée en criant : « Vive la France ! Vive la liberté ! » De tous les points de la Grèce lui parviennent des adresses qui témoignent des mêmes sentimens. Il reste un point noir : le Péloponèse, où s’est concentrée l’armée royaliste, où les partisans de M. Venizelos n’ont pas pu contrecarrer suffisamment la propagande constantinienne. Mais M. Venizelos, mieux renseigné que personne, est en mesure de tranquilliser M. Jonnart à ce sujet. Il l’assure qu’aucun désordre ne se produira dans la péninsule : l’événement devait lui donner pleinement raison.