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intérêts. A. Duval plaide pour le malhonnête Petit Courrier. L’avocat du Roi reconnaît le délit de contrefaçon, et le Tribunal, après mûre délibération, inflige 160 francs d’amende au délinquant, plus 160 francs de dommages et intérêts à payer à la Revue des Deux Mondes.

Voilà une mince affaire, mais les journaux s’en sont emparés. La plaidoirie de Me Rousset, avocat de F. Buloz, est citée et commentée par eux. Ne lui font-ils pas dire, au sujet de la propriété des œuvres de Vigny, acquise récemment par la Revue : « La prose de M. de Vigny est hors de prix ! » On devine que le poète se montra blessé d’une telle expression. Me Rousset, cependant, rétablit les textes, et Vigny, apaisé, écrivit[1] :


« Monsieur,

« Je suis très sensible à vos témoignages de regrets, et à l’explication si loyale, si spirituelle, et si polie de M. Rousset. Je regrette infiniment l’ennui que cela doit lui avoir causé, mais veuillez bien lui dire qu’il n’en doit accuser que la Presse.

« C’est cette commère seule, comme il l’appelle, qui m’a appris faussement, ainsi qu’à tous les abonnés de la Gazette des Tribunaux et du Messager (du 3 juillet), que la marchandise de M. de V. était hors de prix, c’était ce que M. Buloz faisait dire par son défenseur. Je pensais bien qu’il était difficile que ces expressions eussent été celles d’un homme distingué comme l’est M. Rousset, et que cette plainte fût venue d’une personne aussi véridique que M. Buloz. Je suis bien aise de recevoir de M. Rousset une assurance positive de ce mensonge public, qui devait m’être d’autant plus sensible que j’ai refusé, pour être utile à M. Buloz, plusieurs autres journaux rivaux de la Revue, et plus opulens qu’elle. Mais l’opulence ne fut jamais une séduction pour moi, et je les ai peu regrettés.

« A présent, monsieur, je crois que pour que rien ne puisse nuire à l’opinion qu’on doit avoir de l’accord du directeur et des auteurs de la Revue, il serait bon que M. Rousset écrivît au rédacteur de l’un de ces journaux quelque chose qui ressemblât à ceci :

« Il est faux que j’aie déclaré au nom de M. Buloz rien de

  1. A M. Brindeau, de la Revue de Paris.