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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/749

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« Quel est donc le nom du traducteur de Stello ? Je suis étonné qu’il n’ait pas profité de mon séjour ici pour me montrer son travail. Pensez-vous qu’il y eût perdu beaucoup ? J’ai fait demander à Sainte-Beuve par Antony s’il avait quelque commission à me donner, mais mon bon Antony aura perdu ma lettre entre les moulins à vent et le cimetierre (sic) de Montmartre. Répétez donc, s’il vous plaît, cette question à Sainte-Beuve, en l’assurant qu’il n’a pas de meilleur ami que moi. J’ai fait honte à M. Baillière[1]de ne pas avoir Volupté sur sa table. Mettez-le donc un peu plus au courant, et faites qu’on ne lui envoie que de bonnes choses. En vérité, nous n’en manquons pas. Je vais revenir dans peu de jours. J’ai beaucoup vu dans ce pays, et j’ai amassé d’ineffables souvenirs.

« Ecrivez-moi un mot pour que je ne pense pas que vous n’avez point reçu ma lettre. Envoyez la vôtre chez M. Baillière, je l’aurai plus vite qu’à la campagne ; j’irai tous les jours à Londres jusqu’à mon départ.

« Ne m’oubliez pas, je vous prie, auprès de madame Buloz, et croyez-moi bien tout à vous.

« Mille complimens de ma part à M. Bonnaire.

« ALFRED DE VIGNY[2]. »

2 septembre 1836.


On le voit, aucune rancune de la part de Vigny concernant l’épisode de Chatterton : du moins en ce qui regardait F. Buloz ; une grande tendresse, il faut le remarquer en passant, pour Sainte-Beuve ; une grande admiration pour Volupté, toujours.

Dans cette correspondance, si l’on voulait pousser à l’extrême la recherche de mésintelligences qui ont pu naître encore, mais qui, je le répète, furent légères, peut-être les trouverait-on dans le désir affectueux que le poète avait de pousser à la Revue des collaborateurs amis, dont F. Buloz n’estimait pas le talent, De là, les visites de Vigny au directeur, continuellement absent dans ces circonstances, les lettres du poète restant sans réponse, etc. Il faut relire à ce sujet, dans le livre de M. E. Dupuy, le passage concernant la pièce d’Antoni Deschamps : Le retour à Paris. On verra avec quelle insistance « le bon Antoni »

  1. Correspondant de la Revue à Londres.
  2. Inédite.