intérêt pour ma patrie. Quant aux mesures adoptées par les ministres du Roi, j’espère que l’avenir les justifiera.
— Oui, oui, je sais que l’on a ces intentions, s’écria l’Empereur, mais pourra-t-on les exécuter ? Ne fera-ton pas, au lieu de cela, de nouvelles concessions aux ennemis du Roi ? Par exemple, vos anarchistes civils vous laisseront-ils modifier la loi d’élection ? Et vos anarchistes militaires ne chercheront-ils pas à désorganiser, en lui donnant de nouveaux motifs de mécontentement, cette belle Garde, modèle des troupes de l’Europe, cette Garde dont la fidélité, le dévouement et l’excellente composition font le désespoir des révolutionnaires, parce que, avec cette formidable barrière, le Trône est à l’abri et la dynastie régnante inébranlable ? Au reste, monsieur le comte, que des faits justifient les intentions de vos ministres, et je leur rends toute ma confiance. »
Peu de semaines après, La Ferronnays écrivait au baron Pasquier, ministre des Affaires étrangères, qu’ayant rencontré l’Empereur dans une soirée, celui-ci l’avait entretenu plusieurs fois.
« Néanmoins, il ne m’a pas parlé d’affaires et je ne puis me dissimuler qu’on ajourne maintenant des communications plus intimes, jusqu’à la réception des nouvelles de Paris. On en veut de favorables pour rétablir des relations de confiance et ne pas craindre que des égards extérieurs plus marqués les avouent aux yeux de ces mêmes Puissances qui ont reproché et qui reprochent sans cesse à la Russie sa partialité pour un pays où couve encore, disent-elles, un feu capable d’embraser le reste de l’Europe. »
Malgré tout cependant, l’ambassadeur affirmait que l’attitude qu’il constatait était de la bienveillance et que le jour où son gouvernement aurait effectué ce qu’il annonçait et aurait assuré la continuité de sa marche contre les élémens révolutionnaires, il pourrait compter « sur une contenance ouvertement amicale de la Russie et, au besoin, sur une assistance effective. » Mais en attendant, « après la franchise des premières explications, » on se tenait vis-à-vis de lui dans une réserve « tant de confiance que de démonstrations extérieures. »
La nouvelle de l’assassinat du duc de Berry, qui fut connue à Saint-Pétersbourg au commencement du mois de mars 1820, n’était pas de nature à modifier ces dispositions. Le 8, La Ferronnays reçut l’invitation d’aller dîner le même jour chez