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complète réfection dont les Anglais peuvent retarder beaucoup l’achèvement, les sables qui gagnent constamment le long de la côte vont contribuer, en se tassant sur les flancs des deux coques coulées, à l’obstruction du chenal. Et cela d’autant mieux que la drague de Zeebrugge aurait été détruite…

Les constructions édifiées sur le môle recourbé en maçonnerie et surtout sur le terre-plein qui en occupe la concavité paraissent avoir été détruites, en même temps que quelques unités légères, qui avaient là leur poste d’amarrage. Mais le mal est, dans ce cas, de faible conséquence.

Plus grave de beaucoup serait la destruction des écluses extérieures du long canal qui relie le port du Zeebrugge au bassin à flot de Bruges même. Un doute subsiste sur cette destruction, mais un télégramme d’Amsterdam affirme que Guillaume II est allé visiter ces écluses « où deux chalands chargés de ciment auraient été coulés. » Le seuil extérieur serait-il simplement obstrué par ces chalands ?…

L’Empereur allemand s’est, en effet, immédiatement rendu à Zeebrugge[1], bien que son état de santé laisse à désirer, en ce moment-ci. Cette visite hâtive et les commentaires des journaux allemands nous donnent la mesure, à la fois de l’importance des dégâts infligés à la base belge de nos adversaires, de l’intérêt qu’ils attachent à la prompte restauration de cette base et de l’effet moral considérable produit en Allemagne par un coup de vigueur aussi inattendu.

Il faut bien Je dire, nos ennemis s’étaient habitués à l’idée que les marines alliées, se sentant impuissantes devant leurs côtes « si admirablement défendues, » n’entreprendraient jamais au-delà du traditionnel bombardement d’Ostende ou de Zeebrugge, soit par les canons des monitors, soit par les bombes tombées de quelques hydravions au hasard d’une surprise, car les bases d’aéroplanes allemands, Ghistelles et autres sont là tout près et la veille y est bonne. On souriait volontiers, dans les Empires centraux, de cette inactivité systématique de la " force navale britannique, depuis la grande bataille d’il y a deux ans où la Hoch seeflotte s’était déclarée victorieuse, tant elle était surprise de n’avoir point été détruite. L’hypothèse

  1. Aussitôt du moins après avoir reçu le rapport de l’amiral Schrœder, commandant de la place de Zeebrugge, et relevé, dit-un, de ses fonctions, après cette entrevue.