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L’action fut si chaude et si déterminée
Qu’on ne put retrouver de l’embarcation
Qu’une poutre et ces mots : Aux hommes d’action !

Dans un coin cependant, Planche, tout à son aise,
Commente les Reynolds, Prout, et l’École Anglaise,
Quant à Rembrandt, dit-il, « c’était un gros bourgeois »,
Pour écrire ceci, Planche a passé six mois
Dans ce pays du grog, des bravos, de la bière
Qu’assez communément on nomme l’Angleterre.
Un Saint Quaker l’assiste, habit noir et front haut :
C’est un homme du Temps[1], critique sans défaut,
Qui donna l’autre hiver, dans certaine Revue,
Sur le Salon d’alors, des pages sans Revue.
Pages dont l’art utile était le fondement,
Et qui ne poussaient pas trop à l’abonnement.
Rien que le prote eût mis de façon avisée :
Sermons pour être lus au Saint Temps du Musée.

Stello[2] vint, puis bientôt Quiquengrogne[3] après lui,
Ah ! qui dira jamais quel éclair a relui,
Quels rayons infernaux sur le salon tombèrent
Lorsque les deux rivaux, au bal, su rencontrèrent ?

Le comte de Béziers[4], par cet affreux verglas.
N’en vint pas moins au bal… la mort sonnait le glas.
Buloz, son factotum, vint à lui… « Tu me navres
Avec cet habit noir, auteur des Deux Cadavres !
Dit-il, Madame Sand veut rire et non pleurer !
Que viens-tu faire ici ? — Je viens vous enterrer,
Dit Frédéric. Voilà… votre Revue est triste,
Elle est bête, maussade, et n’a rien, rien, d’artiste !
Buloz, mon cher ami, vous êtes un grand sot ! »

Dumas survint : « Soulié, va, je te prends au mot,
Laisse à ce Jupiter son Olympe de cuistres.
Laisse-lui ses amis, ses écrivains sinistres,
C’est un faquin jaloux d’escompter nos esprits.
Il nous offre toujours son papier jaune ou gris.
Mais il ne peut atteindre à la saison prochaine,
Buloz, c’est le roseau, et moi, je suis le chêne ! »

  1. Victor Schelcher.
  2. A. de Vigny,
  3. V. Hugo.
  4. Frédéric Soulié.