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spontanément maintes preuves sous l’Empire, même dans la période des mauvais jours. Alors, Böcking quitta Sarrebrück pour aller à Cologne, et ce départ inopiné a tout l’air d’une fuite ou d’un voyage de conspirateur ; il fut sans doute l’un et l’autre. Böcking rejoignit à l’hôtel Zum kaiserlichen Hofe, Stagemann, l’ardent patriote prussien, l’un des promoteurs du Tugendbund, devenu conseiller d’État et le principal collaborateur du chancelier Hardenberg. Poète à ses heures, Stagemann composa un morceau patriotique qu’il dédia à Bôcking. Cette pièce de vers fut publiée plus tard dans ses Souvenirs historiques, avec une annotation qui rappelle les rapports et les entrevues des deux personnages à Cologne, après la conclusion du traité du 30 mai. La dédicace est datée du 30 juillet 1814, c’est-à-dire lorsqu’il n’y avait plus d’espoir apparent que le rêve des deux conspirateurs, de faire annexer Sarrebrück à la Prusse, pût être réalisé.


IV

Survint la nouvelle du débarquement de Napoléon au golfe Jouan. Tout de suite, les Sarrebrückois, comme les Sarrelouisiens, s’empressèrent d’arborer le drapeau tricolore sur tous les monuments publics ; ils firent chanter le Te Deum dans toutes les églises et, dès avril 1815, ils rédigèrent une adresse à l’Empereur, conçue en ces termes :

« Sire, le maire, les adjoints et les membres du Conseil municipal de la ville de Sarrebrück supplient Votre Majesté d’accueillir de nouveau l’hommage de leur fidélité et de leur dévouement. Ils unissent leurs vœux à ceux de toute la France, pour que de longues années sur le trône où l’amour de la Nation vient de Vous replacer, Vous donnent le temps d’en consolider le bonheur, d’affermir votre dynastie et de jouir, avec votre auguste Famille, du fruit de vos immortels travaux. »

Cet enthousiasme ne devait pas tarder à recevoir son châtiment. Quelques jours après le désastre de Waterloo, l’armée bavaroise commandée par le feld-maréchal de Wrede, puis le corps russe du général Alopeus se présentèrent devant Sarrebrück, ville ouverte qui n’était défendue que par la garde nationale, composée d’environ 500 hommes, à laquelle vint se joindre un petit corps franc d’une centaine de volontaires, commandés par l’intrépide capitaine Jung, de Forbach. Sans