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Seraucourt-Saint-Simon et le canal Crozat jusqu’à Fargniers, — ce qui, à la vérité, créait une poche considérable, profonde de 7 à 12 kilomètres : le 3e corps britannique à droite était serré d’assez près et on doutait déjà, le 21 au soir, au Quartier Général de Gough à Ilarn, qu’on se pût même maintenir sur le canal ; lui-même, quittait Ham pour Nesle, puis pour Roye, — ce qui impliquait l’idée que la bataille allait être reportée fort à l’Ouest.

Les divisions britanniques cependant opposèrent, dans la journée du 22, une très belle défense sur le canal Crozat. Mais dans la soirée, nos alliés perdaient Tergnier et le fait était d’importance, car c’était l’Oise qui ainsi était menacée de forcement et les défenseurs du canal tournés sur leur droite. Par ailleurs, Gough avait ordonné un nouveau repli au Nord-Ouest du canal : la ligne était retirée derrière la Somme, jusqu’à l’Ouest de Ham, et une ligne passant par Offoy, Monchy-Lagache, Vraignes, Brusle, Tincourt et Nurlu, couvrant assez mal Péronne au Nord et déjà, à son centre, beaucoup plus proche de Chaulnes que de Saint-Quentin. Les progrès des Allemands devenaient sur le front Gough alarmants, tandis que l’armée Byng, se contentant de s’aligner, reculait de très peu en ces journées des 22 et 23. Le pis était que les divisions étaient maintenant singulièrement affaiblies et contre elles l’effort allemand croissait. Le repli allait donc s’accentuer encore dans la journée du 24. Si ordonné qu’il fût sur une partie du front, il était cependant trop précipité pour que, sans cesse, des trous ne se creusassent point. Par ailleurs, l’avance allemande se poursuivant au-delà du canal Crozat au Sud, Chauny, Noyon étaient menacés autant que Guiscard, Roye, Nesle et Chaulnes[1]. L’armée britannique, disloquée en certains points, essayait de rétablir ses liaisons, mais, tandis que certaines divisions restaient, au Sud-Est, définitivement coupées du gros, et, parlant, isolées, se cherchant l’une l’autre et se trouvant mal, la 5e armée serrait sur sa gauche, ce qui risquait de découvrir, au Nord de la ligne Chauny-Noyon-Lassigny, le chemin de Paris.

  1. J’insiste peu sur cette bataille anglaise qui a trouvé dans cette Revue son historien averti (Henry Bidou) Les Batailles de la Somme. III. L’offensive allemande en 1918. Voyez la Revue des Deux Mondes du 15 mai 1918, p. 417.