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jolis scandales de son temps, pour amuser, — et pour excuser ou venger par la comparaison, — sa maîtresse Mme de Montglas. Mlle de La Loupe valait déjà Mme d’Olonne, s’il est vrai qu’à son mariage, comme Bussy le raconte, « ses charmes avaient fait, deux ans durant, tous les souhaits de la cour. » Mlle de La Loupe était la voisine de Mlle de La Vergue, rue de Vaugirard. Retz dit qu’ « elles avaient même percé une porte par laquelle elles se voyaient sans sortir du logis ; » et Guy Joly, qu’« il y avait une porte de communication d’une maison à l’autre. » Cependant, la maison de La Vergne n’était pas appuyée sur une autre, à ce qu’il semble. Je suppose que M. de La Vergne avait loué ou vendu aux La Loupe d’Angennes sa maison de l’autre côté de la rue Férou, laquelle était reliée à celle qu’il habitait, et que sa veuve continua d’habiter, par ce pont couvert, bâti en 1641, avec la permission de l’abbé de Saint-Germain-des-Prés. Les deux jeunes filles profitaient du passage et, selon Guy Joly, « Mlle de La Loupe était à tous moments chez Mlle de La Vergne. » Évidemment, la future Mme d’Olonne, déjà cette petite de La Loupe, n’est pas l’amie la mieux trouvée pour Mlle de La Vergne : et l’on peut ici remarquer la légèreté de sa bonne mère.

Or, au mois de mars 1652, Retz, nommé cardinal, mais n’ayant pas encore reçu le chapeau, était un jour à Luxembourg, — c’est le palais du Luxembourg, — auprès de Monsieur. S’il faut l’en croire, les serviteurs de M. le Prince entretenaient alors contre lui des criailleurs à gages qui, ce jour-là, au nombre de deux ou trois cents, font du tapage devant le palais et crient que Retz trahit Monsieur et va le tuer. C’est ce qu’on vient lui annoncer, et à Monsieur, qui ne paraît pas tranquille. Avec Mme de Château-Regnaut et d’Hacqueville, Retz quitte le palais, sort dans la rue, s’adresse aux manifestants, demande le chef. Un gueux se présente, qui a une plume jaune à son chapeau. Retz parle à ce drôle et sait lui parler. Il a de l’entrain populaire, de la bravoure, de l’insolence et de la cordialité. La bande qui s’égosillait contre lui n’aime plus que lui et propose de l’accompagner. Il n’a pas besoin d’une escorte. Il n’a même plus besoin de ses deux amis et, tout seul, s’en va, mais à deux pas de là, chez son parent le chevalier de Sévigné. C’est qu’il a son idée : une idée galante. Ou peut-être l’idée galante lui vint-elle une fois qu’il eut trouvé son refuge dans