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guerre : elles témoignent, en outre, de la pleine et splendide réalisation de la nationalité américaine.

Dans un corps composé de parties sans lien entre elles une personnalité s’est éveillée, sous la sollicitation des circonstances et à l’appel d’hommes supérieurs ; une âme commune s’est formée, qui a unifié cette multiplicité. Par l’action réciproque de cette âme et de ce corps, du peuple et de ses conducteurs, le caractère américain s’est, peu à peu, défini, enrichi, agrandi. L’Amérique, à plusieurs reprises, fut mise en demeure d’opter entre des voies contraires, dont l’une menait au particularisme, à l’égoïsme, au matérialisme, l’autre à l’unité dans la liberté, au développement de la vie de l’esprit, à l’idéalisme, à la vraie grandeur. Et elle a, chaque fois, opté pour la voie tournée vers les hauteurs. Elle a, comme dit son poète-philosophe, accroché son char à une étoile. Elle a, selon l’exhortation d’un autre de ses poètes nationaux, pris pour devise : Excelsior ! Sa nationalité, désormais, veut dire : travail, éducation, noblesse d’âme, liberté, égalité de droits pour les grands et pour les petits, bienveillance, humanité, pénétration mutuelle des intelligences et des cœurs, paix digne et stable, assurée au monde par la constitution, sincère et forte, d’un régime de justice.

Que ce peuple demeure ce qu’il est aujourd’hui, et continue à déployer les nobles vertus que ses grands hommes ont cultivées en lui ; et il méritera, entre tous, le titre de collaborateur de Dieu, que l’Apôtre promet aux hommes de bonne volonté.


ÉMILE BOUTROUX.