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L'AVḔNEMENT D'ALEXANDRE iii
ET SES PREMIERS RAPPORTS
AVEC LA RḖPUBLIQUE FRANÇAISE
1881-1889

NOTES ET SOUVENIRS


I

Alexandre II avait péri assassiné le 13 mars 1881[1]. Le même jour, dans le désarroi fait de stupeur et d’indignation, qui suivit ce trépas foudroyant, son fils, le grand-duc héritier, prenait possession de la couronne sous le nom d’Alexandre III. Devenu tsarewitch en 1865, après la mort prématurée de son frère aîné dont, l’année suivante, il avait épousé la fiancée, la princesse Dagmar, fille cadette de Christian IX, roi de Danemark, le nouvel empereur était âgé de trente-six ans. Dans le peuple, on admirait sa haute taille qui rappelait celle de son aïeul Nicolas Ier et sa force herculéenne dont parfois il ne lui déplaisait pas de donner des preuves ; mais dans la partie pensante de la nation, on attachait plus de prix à ses qualités morales ; sa bienveillance envers les humbles, son caractère pacifique, sa droiture et jusqu’à sa timidité révélatrice de sa modestie. Avant qu’il ne régnât, on se plaisait à saluer en lui le continuateur de la politique libérale vers laquelle on voyait s’orienter de plus en plus l’empereur régnant. Il s’y était toujours associé et on ne doutait pas qu’en montant sur le trône, il y persévérerait.

  1. Comme dans mes précédentes études sur les Romanoff, j’ai donné d’après le calendrier grégorien les dates évoquées dans ce récit.