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gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, l’oncle du maréchal, fut de la sorte tué en duel, à Paris, par un sieur de Rivaudière qui, lui-même, périt des suites de cette rencontre. Ce double trépas témoigne de l’acharnement d’un combat sans merci. Pour François de Castelnau, neveu de celui-là et l’aîné de notre personnage, il suivit tout de cet exemple ; et, de même que Retz, déjà frondeur, s’était « colleté » au bois de Boulogne avec Praslin, lui s’alla « colleter, » sur la place Royale, avec un seigneur qui le laissa mort d’un bon coup de flamberge. Au reste, ces exemples de bravoure ne furent pas les seuls que le petit Jacques de Castelnau, encore enfant, eut sous les yeux.

En 1627, n’ayant que sept ans, il avait appris déjà la fin glorieuse du plus âgé de ses frères, le jeune Henri de Castelnau, son aîné de dix ans et qui fut tué d’un coup de canon au siège que Richelieu avait entrepris devant La Rochelle. Henri de Castelnau n’avait pas dix-sept ans et se trouvait, dit-on, « dans le printemps des espérances qu’on avait de sa valeur. » Par suite de cette mort de son frère Henri, venant après celle de François, Jacques ne tarda pas, de cadet qu’il était, à devenir l’aîné des enfants du sire de Mauvissière.

Sur les trois filles que les parents de Jacques avaient eues d’autre part, deux, dans la suite des temps, devaient prendre les ordres. C’étaient Charlotte, qui fut abbesse de Bussières en Berri, enfin Anne, qui fut religieuse en l’abbaye de Gomerfontaine. Pour la troisième, Marie de Castelnau, elle n’était comme les deux autres qu’une fillette, le jour où leur unique et dernier frère, Jacques, âgé de quinze ans, quitta sa petite seigneurie de Touraine pour prendre, en modeste équipage, ce chemin de Paris au bout duquel l’attendaient tant d’honneurs et, par la suite, un avenir si merveilleux et si fatal.

Ce jour-là, tandis que les colombes roucoulaient dans le jardin tourangeau et que la Loire si douce s’en allait de façon sinueuse en roulant ses eaux sous les arches, le garçon à figure de page vint présenter ses adieux à sa mère et à ses sœurs. Et c’est alors que l’une, — née Charlotte de Rouxel, laquelle avait été fille d’honneur de la reine Marie de Médicis, — et les autres, toutes grêles et bambines qu’elles fussent, venues étreindre et baiser au front le petit bonhomme, sentirent se serrer leur cœur et se mouiller leurs yeux.

Il y a, dans le Loyal Serviteur, tout au début de la Chronique