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mal comprise et dénaturée dans son principe même par l’idéologie, — peut, dans la situation actuelle du monde, être une nécessité d’ordre pratique et d’ordre militaire.

On reconnaîtra tout au moins que jamais dans l’histoire il ne s’est rencontré une heure plus favorable à la réalisation d’une idée de ce genre. Jamais les besoins de solidarité entre les peuples civilisés ne se sont manifestés d’une manière plus impérieuse pour la défense même de la civilisation.


Comment jouera, en ce qui concerne la France et la Belgique, en ce qui intéresse d’une manière immédiate notre défense nationale, le mécanisme militaire d’une association entre Puissances ?

Nous nous trouvons, nous et nos amis Belges, dans une situation particulière. Nous sommes les voisins immédiats de l’Allemagne. La future frontière, — qu’elle suive le tracé de 1815, ou celui de 1814, — n’en demeurera pas moins, dans les deux cas, à quelque 320 kilomètres de Paris, à 100 kilomètres de Bruxelles. Elle ne sera séparée de ces capitales par aucun grand obstacle naturel. Comme la plaine belge restera, demain comme hier, la voie d’invasion la plus facile vers la France, on peut dire que notre situation stratégique d’ensemble, après la grande guerre, sera peu différente de celle d’août 1914. Les pays de la rive gauche du Rhin continueront d’offrir aux armées allemandes une place de rassemblement, qu’elles chercheront à organiser défensivement et offensivement, et qui constituera pour nos deux pays une perpétuelle menace.

Nos Alliés anglais et américains et tous les peuples qui, comme nous, veulent vivre en paix, sont directement intéressés à la défense de nos frontières, dans l’hypothèse d’une attaque brusquée de l’Allemagne. Car la France et la Belgique offrent incontestablement la meilleure zone de rassemblement, presque la seule zone de rassemblement possible des armées alliées d’outre-mer contre l’Allemagne.

Admettons qu’en 19… les armées allemandes réussissent, contre les armées françaises et belges, le coup que leur a fait manquer en 1914 notre victoire de la Marne ; supposons tout au moins qu’elles aboutissent, dans les premières semaines de la campagne, à porter de nouveau les champs de bataille dans le