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de joyeux avènement la France octroierait là aux Alsaciens-Lorrains si heureux de lui revenir !

Où se trouve la solution au moins provisoire de ce problème ? En dehors de celle qui provoquerait dans les deux provinces une véritable révolte, je n’en vois que deux. Voici la première. Les Chambres françaises pourraient être invitées à donner aux Églises de l’Alsace et de la Lorraine un statut spécial en dérogation de la loi de séparation. Le remède serait, en l’espèce, pire que le mal, puisque toute l’irritante question religieuse serait de nouveau soulevée au moment même où, après quatre années et demie de guerre, le pays aspire au calme dans l’union. Ni les partisans de l’intangibilité des lois républicaines, ni ceux qui désirent les transformer dans un sens plus libéral ne peuvent raisonnablement souhaiter que ce débat dangereux vienne devant un Parlement, dont le mandat est près d’expirer.

Reste la dernière solution qui, à mon humble avis, est la seule acceptable. La France retrouve en Alsace-Lorraine son Concordat de 1801. D’accord avec le Saint-Siège, elle le maintient pour cette partie de son territoire. Il n’y a rien là qui puisse porter atteinte à l’unité nationale. Le précédent de la Savoie nous le prouve.

À l’heure présente, les préoccupations d’ordre national doivent, même pour les anticléricaux les plus farouches, primer toutes les autres. Or, dans les provinces retrouvées, où le clergé occupe une situation exceptionnelle et jouit d’une grande influence, le choix des évêques, des curés, des présidents des consistoires jouera, au point de vue de l’évolution du sentiment national, un rôle prépondérant. L’instrument concordataire permettrait au gouvernement d’exercer, en cette question primordiale, une influence décisive.

Je le sais, le maintien, même provisoire, du Concordat en Alsace-Lorraine aurait pour conséquence immédiate la représentation officielle de la France auprès du Saint-Siège et c’est là ce qui arrête les adversaires irréductibles de ce retour au passé. Je ne m’attarderai pas à discuter les avantages de la reprise des rapports avec le Vatican. Qu’il me suffise d’établir que, dans les Chambres françaises, le nombre des intransigeants a considérablement diminué et que des hommes qui ne sauraient être suspectés de cléricalisme, comme MM. de Monzie et Lazare