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CONDAMNÉE À MORT PAR LES ALLEMANDS.

français. Le marquis de Villalobar avait été avisé de la présence à Saint-Gilles de la comtesse de Belleville : on ne lui avait signalé aucune autre Française. Il se rendit à la Kommandantur pour demander compte de cette négligence ; on lui répondit que j’étais Belge ; mais ayant examiné mes papiers, il se convainquit de ma qualité de Française. Dans le procès, nous n’étions d’ailleurs que deux de cette nationalité, et la mienne s’étalait tout au long sur l’affiche. Le marquis de Villalobar avait déjà télégraphié au roi d’Espagne pour l’intéresser au sort de la comtesse de Belleville. Il s’empressa de lui télégraphier à nouveau pour moi.

Vers cinq heures du soir, ne recevant aucune réponse d’Espagne, l’ambassadeur se rendit à la Kommandantur et, au nom de son Roi, sollicita un sursis pour notre exécution. « Non, lui fut-il répondu, votre Roi ne peut avoir déjà formulé pareille demande. Ces femmes seront fusillées demain, tout est prêt. » Convaincu de l’inutilité de ses démarches, l’ambassadeur n’insiste plus… Vers huit heures et demie du soir, la dépêche tant attendue arriva enfin !

Le roi d’Espagne demandait qu’il fût sursis à notre exécution. L’ambassadeur se précipita à la Kommandantur. Devant cette demande formelle du Roi, les Allemands n’osèrent donner suite à leur projet, le sursis fut accordé. Quelques heures seulement nous séparaient de l’heure fatale, et un gardien belge que j’interrogeai après avoir appris ces détails m’affirma que des ordres avaient été donnés à la prison en vue de notre exécution pour le 13 octobre. Le sursis accordé, le Kaiser demanda nos dossiers. Le roi d’Espagne et sa Sainteté Benoît XV ne cessèrent leurs instances que le jour où notre grâce leur fut annoncée.

Rassurées sur notre sort par la visite du marquis de Villalobar, nous attendions avec impatience l’annonce officielle de notre grâce ; nous la trouvâmes le 12 novembre 1915, dans le journal la Belgique en tête des communiqués officiels.

Communiqués officiels (Belgique, 9 novembre 1915).
Communiqués allemands
Bruxelles, 8 novembre.

Faisant usage de son droit de grâce, Sa Majesté l’Empereur a daigné commuer en travaux forcés à perpétuité la peine de mort