Enfin, les Alliés ont dit leur dernier mot. Ils l’ont dit le lundi
16 juin vers sept heures du soir. M. Clemenceau l’a déclaré, en sa
qualité de Président de la Conférence, à M. le comte de Brockdorff-Rantzau, en conclusion de la lettre d’envoi qui accompagnait la Réponse des Puissances alliées et associées aux Remarques de la Délégation allemande. « Pour conclure, les Puissances alliées et associées doivent
affirmer clairement que cette lettre et le mémorandum qui y est
annexé constituent leur dernier mot. » La lettre d’envoi est d’un
ton excellent, à la fois vif et ferme, et l’on se féliciterait d’y retrouver
le tranchant de tel style connu ou la netteté de tel autre style, tous les
deux bien français, si quelque détail (par exemple, l’évaluation des
dettes de guerre en livres sterling) ne montrait, jusque dans la version française, qu’elle a été pensée et écrite en anglais.
Les Remarques de la délégation allemande avaient été franchement pensées et écrites en allemand, dans cet allemand inimitable et invariable qui, à travers les siècles et les régimes, est demeuré toujours semblable à lui-même, car « la culture » a développé et n’a pas corrigé « la nature. » Le rédacteur anonyme de la Réponse des Puissances alliées et associées ne pouvait maquer d’en être frappé. « La protestation de la Délégation allemande, dit-il, prouve que celle-ci méconnaît la position dans laquelle l’Allemagne se trouve aujourd’hui. » A quel point elle méconnaît cette position, l’ignore ou feint de ne pas la sentir, il suffit, pour s’en convaincre, de parcourir son mémoire, hautain, hargneux, plein d’un orgueil dont une défaite amortie n’a point brisé toute l’insolence, par endroits ingénu et doucereux, par endroits perfide et cynique, mais où partout s’étale une sorte de naïveté dans l’audace qui tour à tour exaspère et désarme, tantôt fait crisper le poing et tantôt casse les bras. Si c’est calcul, et si c’est l’effet psychologique auquel la diplomatie allemande a visé, elle l’a en partie