Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/399

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toutes nos cartes géologiques, le minerai de fer perde, dans les conditions de l’industrie actuelle, toute valeur pratique. La zone ferrifère utilisable présente, au maximum, 30 kilomètres de large et s’atrophie par endroits (entre Saint-Privat et Pont-à-Mousson) jusqu’à zéro. De même, on voit varier, suivant les endroits, la proportion de trois corps chimiques accessoires qui exercent une grande influence en métallurgie, la chaux, la silice et le phosphore.

A ce sujet, il convient de rappeler une notion fondamentale, très généralement ignorée, c’est qu’un minerai de fer et un non-minerai ne se distinguent pas l’un de l’autre par une démarcation absolue et tranchée, comme on l’imagine d’ordinaire et comme, sans sortir du monde minéral, nous discernons, en effet, deux minéraux cristallisés dans une collection de l’École des Mines. Il n’y a pas de coupure entre eux, mais seulement des nuances et l’appréciation économique de ces nuances dépend à la fois du temps et de l’espace. Tout caillou quelconque du chemin est, si on le veut bien, un minerai de fer, puisqu’il contiendra toujours du fer (en moyenne 5 pour 100) et puisqu’on pourrait extraire ce fer en y mettant le prix. Mais on ne donne le nom de minerai qu’à ceux de ces cailloux qui fournissent du fer avec bénéfice, étant donnée la situation industrielle du pays où on les rencontre et l’époque où on vit. Ici plus que partout ailleurs, on est en droit de dire : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au delà. »

Le minerai de fer lorrain, auquel on donne le nom de « minette », présente l’aspect d’un grès brunâtre ou verdâtre, plus ou moins rougi à l’air, dans lequel on voit à la loupe d’innombrables petits grains pareils à des œufs, des « oolithes, » grains englobés dans un ciment qui, suivant les points, peut être plus ou moins argileux, calcaire ou siliceux. La teneur en fer moyenne est de 35 à 40 pour 100, avec minimum utilisable de 20 à 26. Une certaine teneur en phosphore, qui n’est plus une gêne aujourd’hui, a été considérée longtemps comme un empêchement absolu. Enfin, j’ajoute, pour fixer les idées, que le prix de vente moyen s’élevait, dans ces dernières années, sur la mine, avant tout transport, pour l’ensemble de la production, à environ 4 fr. 50 ou 5 francs pour la tonne de 1 000 kilos : c’est-à-dire qu’il s’agit d’une substance ayant une valeur très faible, malgré les milliards que l’ensemble du gisement représente :