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peu les jambes, visiter la ville, faire « son petit tour de boulevard » (Maurice Faivre). On a compté sans les taubes, dont il rôde toujours quelque couple au-dessus de la ville, et la leçon ne tarde pas. Une escouade de la 3e section de la 9e compagnie avait « cru pouvoir chauffer le café au rez-de-chaussée ; un gros obus tombe dans la pièce, tue un quartier-maître et blesse le second maître Le Glas et cinq hommes de son escouade. » Peu après, un autre obus tombe sur la gendarmerie, traverse les étages, éclate dans la cave et y tue « deux officiers belges avec la presque totalité de la section qui est avec eux ; un troisième officier, debout devant le soupirail, est projeté sans mal sur la chaussée. » Puis c’est le tour de deux badauds de la 9e compagnie, qui sont atteints « dans la rue. » Enfin un nouvel obus de gros calibre, « tombant dans la même maison que ce matin, pénètre dans la cave » et y blesse, — heureusement sans gravité, — les trois derniers survivants de la 9e escouade. « La voilà supprimée de l’effectif (Poisson). »

Comme début, ce n’était pas trop engageant et, pour peu que le 420 de Weslende continuât à faire des siennes, le séjour en cantonnement de réserve deviendrait plus dangereux que le séjour aux tranchées. Il s’en fallait pourtant que ces tranchées du sous-secteur Sud, bien qu’un peu moins rudimentaires que celles du sous-secteur Nord, fussent des modèles d’organisation. Du canal de Plaschendaele au Noord-Vaart, notre ligne, presque aussi irrégulière que celle de la route de Lombaertzyde au canal de Plaschendaele, décrivait une série de rentrants et de saillants qui compliquaient plus qu’ils ne servaient la défense. Mais c’était vers Saint-Georges surtout, dans une plaine à peu près complètement inondée et d’où émergeaient seulement les remblais des routes, les digues des canaux et les clyttes qui portaient çà et là les bâtiments ruinés d’une ferme, que l’ingéniosité des marins avait à résoudre un problème difficile. Ce qu’on y appelait les tranchées n’était qu’un « pointillage de trous, » un « chapelet de petits gourbis » creusés longitudinalement dans la berge aux endroits où elle était suffisamment résistante. Pour communiquer avec ces gourbis, on n’avait d’autre défilement que la piste en contrebas du remblai et qui était trop souvent interrompue elle-même par l’inondation. Un officier compare justement ces routes à de « longs tentacules » rigides dont les gourbis eussent été les « ventouses. >> Les