MM. Hermann Müller et Bell. Si le ministre Hermann Müller n’eût été que le camarade Hermann Müller, il y aurait eu lieu de ne lui faire qu’un médiocre crédit. C’est lui, en effet, qui, en juillet 1914, était venu bercer de sa chanson faussement pacifique, paroles et musique de M. de Bethmann-Hollweg, la candide somnolence et les songeries creuses de nos plus éminents socialistes. C’est lui qui les avait joués et bernés, comme jamais hommes, depuis qu’il y a des hommes qui, les uns, trompent et, les autres, sont trompés, ne furent joués et bernés ; lui qui leur avait donné le baiser de Judas ; et quand, après l’armistice, ils l’avaient retrouvé à Berne, ils le lui avaient amèrement reproché. Mais, à présent, il était ministre, ministre des Affaires étrangères, et le portefeuille, dans les affaires d’État, confère (que l’on nous passe ce jeu de mots involontaire) des grâces d’Etat. Quant à M. Bell, député du Centre, qui, à défaut de M. Erzberger proclamé « indésirable, » figurait dans la délégation la seconde fraction gouvernementale, il n’était que le Schmidt de M. Müller, et, comme lui, du reste, il était ministre. Évidemment, au mois de janvier 1871, la troupe chamarrée des princes ou des généraux était plus reluisante, avec Bismarck et Moltke sur les marches du trône, et le grand-duc de Bade levant la bannière impériale, en criant : « Hourrah pour l’empereur Guillaume ! » Les temps aussi étaient plus heureux, le ciel de l’Allemagne plus brillant. Et l’on manquerait à ce minimum de justice auquel un ennemi même a droit, si l’on ne reconnaissait que MM. Hermann Müller et Bell, en leurs redingotes étriquées, ont mis, à consacrer la capitulation de leur patrie, une simplicité affligée qui n’était pas sans dignité.
Maintenant, ce qui avait été fait à Versailles, en janvier 1871, y a-t-il été défait, en juin 1919 ? L’aigle allemande, qui se tord au plafond de Le Brun, n’a-t-elle plus sur le cœur l’écusson impérial, at-elle de nouveau un écusson royal ou national cloué sur chacune des plumes de ses ailes ? — Comment le nier ? L’Allemagne, qui ne sort plus de la Galerie des Glaces Empire universel ni Puissance militaire prépondérante, en sort plus qu’unie, une, et plus une en 1919 qu’elle n’en était sortie en 1871. A cet égard, elle a sauvé ce qu’elle tenait par-dessus tout à sauver, l’unité allemande, qui est l’Allemagne même ; l’Allemagne au dessus de tout. En 1871, les Allemagnes étaient encore là, derrière l’Allemagne unie qu’elles consentaient à former. A l’avant-traité de Versailles, du 26 février 1871, étaient parties et signaient les royaumes de Bavière et de Wurtemberg, et le grand-duché de Bade. Le moins qu’on eût pu et qu’on