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à l’intérieur. S’étant présenté à l’audience du Premier Consul, il fut très bien reçu : « N’êtes-vous pas, lui dit Bonaparte, le frère d’un capitaine d’artillerie avec lequel j’ai servi ? » puis sans attendre la réponse : « Ah ! oui, vous différez d’opinion, votre frère est royaliste, vous, vous êtes républicain, n’est-il pas vrai ? » Il le plaça à la neuvième division territoriale a Montpellier (21 thermidor IX — 9 août 1801) d’où, avant même qu’il fût installé, il le transféra à Bordeaux.

Malet eût voulu rester à Besançon, surtout il eût souhaité commander dans son pays natal, à Lons-le-Saulnier, et s’y créer ainsi un fief où il eût disposé des hommes et des choses ; mais il n’était point de la politique du Consul de confier ainsi à des officiers généraux le contrôle sur leurs concitoyens d’origine. Aussi Malet s’indigne : « on l’a envoyé dans la onzième division parce que personne n’en voulait. Il m’en a coûté cent louis pour me transporter ici, avec ma famille, écrit-il à un ami, et, en arrivant ici, j’ai trouvé la ville la plus chère de toute la République, sans même en excepter Paris, et l’on est loin d’y trouver les mêmes agréments, malgré la grande réputation de Bordeaux qui a tous les désagréments des grandes villes sans en avoir les ressources. »

Au nombre des désagréments et au premier rang, se trouvait, outre le préfet, un commissaire général de police, « l’un et l’autre remplis de prétention, de manière, écrit Malet, que nous ne nous voyons pas, tout au plus pour les affaires de service ; encore nous laissons le commandant d’armes traiter de ces choses-là. »

« Une mauvaise santé, » un caractère atrabilaire, un perpétuel désir de changement, une mésintelligence établie avec les fonctionnaires civils, c’est le caractère que Malet déploie dès le moment où il est parvenu à un grade supérieur. Il ne peut supporter des égaux ou des pareils, il veut être partout le premier, agir à sa fantaisie et gouverner tout ensemble. Trouvant des obstacles à Bordeaux chez le commissaire général de police, «  il traite cet important personnage avec dédain » et sollicite son changement. Il est nommé à !a 20e division et arrive à Périgueux le 4 floréal an X (24 avril 1802). Son premier soin est de demander un congé de deux mois à solde entière. Cette faveur lui est accordée, et sans doute une autre, sa mutation de Périgueux à Angoulême où il arrive vers la mi-thermidor (août 1802).