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fonctions sociales devront correspondre deux types d’éducation. De même d’ailleurs que nous avons reconnu ce que nous avons appelé des fonctions limites, ces deux types d’éducation se rapprocheront parfois, et il devra y avoir des raccords possibles de l’un à l’autre. Si ces solutions ne sont pas plus nettes, c’est la faute du temps où nous vivons. D’autres temps ont connu des idéals mieux définis. Encore a-t-on pu remarquer qu’il n’y a pas une époque qui ne soit, en un certain sens, une époque de transition.

Il est à noter que, alors que les professionnels de l’enseignement considèrent avec quelque scepticisme tout ce qui ne fait pas partie des matières qu’ils enseignent, et n’admettent aucune éducation en dehors de celle qu’ils donnent, les parents représentés par leurs associations, et, dans la commission même dont nous avons relaté les travaux, les membres étrangers à l’enseignement se sont montrés absolus et intransigeants sur le caractère féminin de l’éducation féminine. Ils ont maintenu le principe de Rousseau : « Donnez une éducation de femmes aux femmes. » Cela s’entend d’abord de ce qu’on a toujours appelé les travaux féminins, qu’il s’agisse de couture ou de cuisine, travaux que les féministes les plus ardentes n’ont pas encore songé à attribuer aux hommes, ni même à partager avec eux, quoique la logique de leurs principes eût dû les mener à ce partage. Loin de tomber en discrédit, l’enseignement ménager est à la mode. L’aiguille a repris du prestige, depuis qu’elle a travaillé pour nos soldats. Et la vie moins facile met en valeur les qualités de la ménagère. Mais, indépendamment de ces raisons d’actualité, l’enseignement ménager bénéficie, depuis quelque temps, d’une sorte de remords de l’opinion. On se rendait compte que l’enseignement devait réparer le tort qu’il faisait à l’éducation domestique et maternelle, et que le lycée devait donner lui-même les connaissances pratiques qu’il ne laissait plus le temps de demander aux lentes initiations de la vie familiale. Puis la science et la théorie pénètrent partout, se substituant à l’empirisme et aux recettes. Physiologie et chimie réclament donc la cuisine comme une dépendance. D’autre part les arts, qui ne sont point les beaux-arts, retrouvaient une faveur où la modeste aiguille eut encore sa part. Les arts féminins viennent s’ajouter au travail féminin, comme le