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officier. Tous n’avaient pas été chassés, mais ceux qui restaient ne sortaient qu’en civil. Leur situation était lamentable. Ils ne recevaient plus aucun traitement que celui que les soldats voulaient bien leur allouer. Dans les corps de garde, où était affiché l’emploi du temps, on lisait des phrases de ce genre : « A telle heure, revue d’armes par le lieutenant X... Les soldats sont invités à ne pas l’injurier. »

Les officiers du Ministère ou de l’Etat-Major, qui avaient du service à l’extérieur, des relations avec des autorités civiles ou les missions alliées, ne pouvaient se mouvoir qu’accompagnés par un gardien, soldat délégué par le Conseil. Tous les ordres émanant du Ministre de la Guerre ou de ses bureaux devaient être contresignés par un membre du Vollzugsrath. De hauts personnages, des officiers supérieurs, le passant dans la rue, suppliaient les officiers de l’Entente d’appeler le maréchal Foch pour rétablir l’ordre.

En province, la situation était meilleure et cela d’autant plus qu’on se rapprochait des armées d’opérations. Comme à Berlin, toute l’autorité y était passée aux conseils de soldats devenus le seul pouvoir d’exécution. Mais ces conseils étaient beaucoup plus sérieux que ceux de Berlin ; ils n’étaient pas anarchistes comme les soviets russes et beaucoup d’entre eux, bien que très jaloux de leur pouvoir, conservaient de l’autorité aux officiers qu’ils « avaient gardés. Le contraste entre les soldats qui venaient de se battre et ceux de l’arrière, se manifesta le 16 décembre, lors de la grande réunion de délégués de tous les conseils de soldats de l’Empire à Berlin. Les propositions discutées lors de la première séance étaient relativement raisonnables et l’ordre du jour était sage. Mais dès le 17, l’assemblée fut envahie par les énergumènes de la garnison de Berlin, qui imposèrent les mesures les p’us folles. Le 18 décembre, le ministre de la Guerre, général von Scheuch, l’Alsacien, donna sa démission ainsi motivée : » Mes ordres n’arrivent plus jusqu’en bas ; des organes ou des personnes irresponsables réussissent à empêcher leur exécution. »


LA BATAILLE DANS LES RUES

Il arriva ce qui devait fatalement arriver. La division de marine composée des éléments les plus mauvais se mutina le