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mencer le blocus et à faire la guerre. Mais avant d’en arriver à cette extrémité, il y a des étapes. Le traité de paix prévoit que l’occupation de la rive gauche du Rhin, dont la durée est fixée selon les régions, pourra être prolongée si l’Allemagne n’a pas exécuté le traité. En outre, des commissions de contrôle fonctionneront et permettront de rappeler l’Allemagne à l’ordre, si elle continue, par exemple, de préparer des armements ou d’entretenir des effectifs plus nombreux qu’elle ne doit. Mais qui centralisera les renseignements à ce sujet ? Qui en tirera les conclusions pour les gouvernements alliés ? À Londres, M. Clemenceau et M. Lloyd George ont pris une résolution qui semble très heureuse. Ils ont décidé d’établir un organisme militaire interallié qui sera permanent sous la présidence du maréchal Foch. L’unité du commandement qui a fait la force des Alliés pendant la guerre fera aussi leur sécurité au cours des années qui viennent. Ce comité interallié sera comme un État-major destiné à renseigner les gouvernements, à préparer les mesures, à expliquer les besoins de chaque pays et la répartition des forces de chacun : il sera le signe vivant que ceux qui ont triomphé ensemble veulent ensemble réaliser la paix, et puisque l’Allemagne ne s’incline que devant la force, il sera le symbole toujours présent des forces associées des grandes puissances victorieuses.

Pour maintenir l’Allemagne dans ses limites, la politique depuis longtemps connaît un autre genre d’action : elle s’intéresse aux nations qui peuvent faire contre-poids à l’Allemagne. Historiquement et géographiquement il y a deux nations pouvant jouer ce rôle, et actuellement elles n’existent plus ni l’une ni l’autre : c’est la Russie et l’Autriche. La Russie a été mise hors de cause par la révolution et l’Autriche disloquée par le traité de paix. Les Alliés savent très bien que rien ne sera réglé en Europe, tant que le problème russe ne sera pas éclairci : mais ils se déclarent au fond hors d’état d’improviser une solution et ils attendent les événements sans rien tenter. La question autrichienne se présente sous un aspect très différent. La nation qui pouvait théoriquement dans le passé servir de contrepoids à l’Allemagne, lui a surtout servi de complice. La politique des Alliés, au cours même de la guerre, a tondu à la dislocation de l’Autriche. C’est une question de savoir si elle était la meilleure des politiques, mais c’est un fait qu’elle a réussi. Sur les ruines de l’ancienne monarchie, s’élèvent aujourd’hui les États qui en sont les successeurs affaiblis et les États affranchis qui doivent servir de barrière au germanisme en Orient. Seulement, le problème autri-