publicité nouvelle. Le Français a besoin d’amour. Il aime à être aimé. Citer des noms, conter les hauts faits de nos hommes, en faire honneur à leur régiment, à leur ville, ce fut un des moyens d’action les plus forts sur ce peuple d’amour-propre si vif. Ces articles étaient lus, commentés au village. Nous sommes toujours les Français de ce Joinville, qui se battait à la Mansourah en pensant qu’« on parlerait de cette journée dans les chambres des dames. » On en vint à tenir ces récits semi-officiels pour une sorte de récompense, comme une espèce d’ordres du jour. Plus tard, lorsque fut rétablie la distinction de la fourragère, M. Madelin fut chargé de faire l’historique des régiments qui la reçurent. Pétain, qui n’avait pas été d’abord sans une certaine froideur à l’égard de l’Information, apprit bientôt à se servir d’un instrument si précieux. Lorsqu’il devint général en chef, au mois de mai 1917, au moment des mutineries qui suivirent l’affaire du Chemin des Dames, c’est lui qui demanda à Madelin le bel article, paru ici même, sur la Crise de la discipline en 1792.
Je n’ai pas à rappeler cette série d’études qui devait s’achever sur les grandes fresques des Merveilleuses Heures d’Alsace et de Lorraine, et de la Bataille de France. Ces récits contiennent les éléments d’une histoire complète de la guerre. Et l’écrivain y atteint à une maîtrise accomplie. Il y a dans ces pages un instinct des ensembles, un art de simplifier les faits, de faire mouvoir les masses, de, situer le sujet par la topographie, de l’éclairer par des portraits, de faire comprendre une situation, d’expliquer une manœuvre, de la placer sur le terrain et de tout ramener cependant au cerveau d’un seul homme ; il y a une façon de distribuer les parties, de peindre les individus, de varier l’intérêt et de le soutenir ; il y a enfin d’un bout à l’autre, pour soulever cette masse de faits, un ordre, un mouvement, un souffle, qui feront de ces beaux récits des modèles de l’histoire militaire. J’aimerais à montrer comment M. Madelin gagne cette gageure de renouveler ses tableaux, de les graduer, d’établir de l’un à l’autre une sorte de crescendo continu qui, à travers les épisodes et les péripéties, ne cesse pas un instant dans ces quatre ou cinq cents pages. On verrait là ce que l’histoire gagne à être traitée, suivant le mot des Latins, comme un opus oratorium, c’est-à-dire par un écrivain, avec les procédés de la composition et comme une œuvre d’art.