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à l’autre, paralysé par les prohibitions de sortie édictées en France et en Italie, put reprendre quelque activité grâce à des dérogations qu’ils se sont consenties mutuellement sur certains articles d’exportation.

Ils ont enfin combattu ensemble l’ennemi commun par le blocus. La participation de l’Italie à la guerre économique a été graduelle. C’est dire qu’elle a présenté d’abord des lacunes, qui n’ont été comblées que peu à peu. En déclarant la guerre, le 24 mai 1913, à l’Autriche-Hongrie seulement, le gouvernement italien n’a interdit à ses sujets de commercer qu’avec cette seule Puissance. Il a eu d’autant plus tort de s’en tenir là que, ayant rompu à la même date ses relations diplomatiques avec l’Allemagne, il aurait pu et dû rompre en même temps ses relations commerciales avec elle.

Le commerce avec l’Allemagne est resté libre pour l’Italie, sous les réserves et restrictions, nombreuses il est vrai, qui résultaient des décrets rendus pendant la période de neutralité. Sans doute limitée à l’Autriche-Hongrie, l’interdiction de trafiquer n’a-t-elle pas été sans intérêt pratique pour les alliés de l’Italie ; mais elle leur a été évidemment beaucoup moins utile que si elle eût été d’emblée étendue à l’Allemagne. Elle ne l’a été que plus de huit mois après. C’est seulement le 4 février 1916, quelques jours avant la visite à Rome de M. Briand, qu’a été accomplie la rupture commerciale entre l’Italie et l’Allemagne. À partir de ce moment, il n’est plus resté aux Allemands, pour tirer quelque chose de l’Italie, que la ressource de la contrebande par la Suisse. Encore cette contrebande a-t-elle été progressivement réduite par l’application d’accords conclus entre les Alliés, Italie comprise, et la « Société suisse de Surveillance économique, » qui a garanti la consommation en Suisse des marchandises exportées d’un des pays de l’Entente.

Graduellement aussi le gouvernement italien, entré dans le conflit avec une doctrine, d’après laquelle l’étal de guerre devait laisser aussi intacts que possible les rapports de droit privé, en est venu à frapper, dans tous ceux de leurs intérêts où il a pu les atteindre, les sujets de tous les pays ennemis.

Une série de décrois, échelonnés entre juin 1915 et août 1916, témoignant d’efforts successifs pour se dégager d’une théorie erronée, a mis obstacle à toutes opérations de crédit ou