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Les chênes, les sapins grandiront à nos yeux,
Colonne après colonne, ogive après ogive,
Tout sera solennel, et, dans nos cœurs pieux
Brûlera la foi primitive.

Nous verrons se glisser un peu d’or par endroits,
Les cieux, comme un vitrail, seront de pourpre sombre.
Et pour prier, alors, nous unirons nos doigts.
Au-dessous des arceaux sans nombre.

Puis nous irons, très lents, de mystère entourés,
Jusqu’auprès de la source, en miracles fertile,
Que fit un jour jaillir, rien qu’en frappant le grès,
D’un coup de crosse, sainte Odile.

Et là, nimbés de soir, sous l’émoi des rameaux.
Nous attendrons tous deux, pris de mystique ivresse,
Eveillés au divin par la vertu des Eaux,
Que la Bienheureuse apparaisse ;

Et peut-être bientôt, complaisante à nos vœux,
Pourrons-nous voir, docile aux plus faibles haleines.
Son fantôme léger, vaguement lumineux.
Parmi les branches incertaines.


TRUTTENHAUSEN


Le ciel, si noir hier, et si lourd à mon âme.
Est, aujourd’hui, léger et bleu ;
La poésie en moi chante un épithalame,
Fervent comme la myrrhe, ailé comme le feu.

Les coteaux sont parés de joie et d’innocence,
Les oiseaux font un chœur bavard.
Chaque feuille reluit ; l’abeille recommence
À dérober aux fleurs leur suprême nectar.

On dirait que l’été recolore les choses,
Et que juillet est de retour ;
Les chênes sont plus verts et les pins sont plus roses ;
L’heure à l’heure sourit, tel le songe à l’amour.