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offensives sont allées bien au delà de leurs objectifs et, protégées par leur barrage roulant, ont détruit des canons et ramené 11 387 prisonniers, dont 284 officiers. En y ajoutant le chiffre des tués et des blessés graves, on ne peut évaluer les pertes de l’ennemi à moins de 25 000 hommes, sur un front de 10 kilomètres. 115 canons ont été pris et détruits, et la défense de Verdun est établie sur la partie la plus étroite des côtes de Meuse, dans une excellente position.

L’effet moral produit par cette victoire fut considérable dans les deux camps. Les Allemands en tirèrent fort prudemment beaucoup d’enseignements utiles, et reconnurent notamment l’impossibilité de réduire la défense à des lignes de tranchées régulières, objectifs trop visibles pour l’artillerie ennemie. Les Français y virent une éclatante confirmation des méthodes employées le 24 octobre : sans diminuer ce succès, il eût fallu remarquer que les objectifs les plus éloignés (3 km.) qui, d’après l’horaire fixé, devaient être atteints en quelques heures, n’avaient été conquis que le quatrième jour. Assurément, ce n’eût pas été la condamnation des procédés employés, et en particulier de l’horaire fixé à l’avance : mais c’eût été établir la nécessité de prévoir que cet horaire pourrait ne pas être suivi, et qu’il faudrait manœuvrer ; car l’avance ne se produit pas toujours avec une exactitude mécanique.

Le 12 décembre, l’Allemagne avait fait pour la première fois des ouvertures de paix qui paraissaient destinées à détendre les énergies dans les gouvernements, les armées et les peuples de l’Entente. En remerciant ses troupes victorieuses, le général Mangin constatait les résultats obtenus, les espérances qu’ils faisaient concevoir pour l’avenir, et il ajoutait :

« Mes amis !

S’avouant incapables de nous vaincre sur les champs de bataille, nos sauvages agresseurs osent nous tendre le piège grossier d’une paix prématurée. Tout en ramassant de nouvelles armes, ils crient « Kamarad. » Vous connaissez ce geste.

« Nos pères de la Révolution refusaient de traiter avec l’ennemi tant qu’il souillait le sol sacré de la Patrie, tant qu’il n’était pas repoussé hors des frontières naturelles, tant que le triomphe du droit et de la liberté n’était pas assuré contre les tyrans. Nous, nous ne traiterons jamais avec les gouverne-