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ou à l’instruction sur un front calme se réduisait de plus en plus. Les troupes s’usaient. Nous étions toujours à la veille d’une catastrophe. » On ne saurait assez insister sur cet aveu, criant de sincérité.

Les indiscutables succès remportés sur la Roumanie, malgré la vaillance des soldats roumains, ont délivré les Empires centraux d’un grand péril et leur ont procuré des ressources importantes ; mais Ludendorff, qui a décidé et poursuivi cette offensive, en résume les résultats : « En dépit de la victoire sur l’armée roumaine, nous étions plus faibles en ce qui concerne la conduite générale de la guerre. »

Il est très facile aujourd’hui de constater cette situation, et elle apparaîtra encore plus clairement quand l’ensemble des témoignages en aura précisé le contour et les dimensions. Les renseignements du 2e bureau de l’état-major général permettaient au général Joffre de s’en faire une idée suffisamment exacte pour qu’il pût demander à sir Douglas Haig de continuer la pression sur le front anglo-français jusqu’à la bataille du printemps 1917. Personne n’en peut douter, si l’unité de commandement avait existé sur le front anglo-français, le général Joffre aurait poursuivi son dessein. Nous le savons aujourd’hui, l’état de l’armée allemande ne lui permettait pas de continuer la même résistance, et la situation au printemps 1917 eût été la même qu’en juillet 1918 au moment où la première offensive menée à fond, par un commandement unique, commençait contre une avance arrivée à la limite de son effort.

Sans doute, en 1916, il eût été souhaitable qu’à Verdun la formule entre « camp retranché » et « région fortifiée » eût été trouvée, mais il s’agit là d’un point de détail ; que sur la Somme, entre le commandement suprême, qui concevait juste, et les exécutants qui comprenaient bien, l’intermédiaire eût compris aussi bien qu’à Verdun, mais c’était là question accessoire de personnes, qui se fût réglée sur le terrain au cours de l’action.

Aujourd’hui, il est permis de l’affirmer, la victoire finale pouvait être obtenue dès le printemps 1917 par les procédés employés en 1916, quelle que fût par ailleurs la rigidité dans l’emploi d’une formule nouvelle de l’offensive, que le général Foch eût assouplie, que les exécutants eussent élargie, et que les intermédiaires appliquaient aveuglément. Les Français sont