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REVUE SCIENTIFIQUE

LE RÔLE DE LA SÉCRÉTION INTERNE


« Connais-toi toi-même, » disait Socrate. A examiner l’état présent de la science, on voit que ce conseil du bon philosophe parait avoir été bien peu suivi. Alors que l’étude du monde extérieur, et particulièrement celle des phénomènes inorganiques, est dès aujourd’hui remarquablement avancée, alors que la constitution et l’évolution des plus lointaines étoiles nous ont livré quelques-uns de leurs troublants secrets, notre propre corps continue à nous être à peu près inconnu, pour ce qui concerne du moins son fonctionnement. J’entends bien que Socrate, dans la phrase qui vient d’être rappelée, voulait désigner surtout notre âme. Mais, si spiritualiste qu’on soit, on ne saurait pas douter que les facultés de notre âme ne soient, par des liens plus ou moins lâches, mais assurément réels, solidaires de celles de notre corps, et que, par conséquent, de même que l’étude du parfum de la rose est inséparable de celle de la rose elle-même, de même qu’on ne connaît bien la nature des sons d’un violon qu’en examinant les cordes vibrantes qui les émettent, pareillement l’étude de notre organisme est une condition essentielle de la connaissance de notre âme.

C’est la physiologie qui a la charge redoutable de nous faire connaître le fonctionnement du corps humain. Si jusqu’ici, elle n’a pu que lever à peine le voile sur les mystères innombrables de ce fonctionnement, ce n’est nullement que le conseil de Socrate n’ait pas, depuis longtemps, été le fil directeur de beaucoup de savants et même de beaucoup d’ignorants ; c’est parce que en réalité l’étude de l’organisme, et d’une manière générale celle de la matière vivante, est infiniment