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Cette question, la voici : que faut-il penser, d’après les découvertes et les précisions récentes de la science, des phénomènes depuis longtemps signalés sur la planète Mars par divers observateurs ? Autrement dit, qu’est-ce que les fameux « canaux » de Mars ?

C’est l’astronome italien Schiaparelli, aujourd’hui décédé, qui, je crois, signala, le premier, en 1877, à la surface de la planète Mars, le réseau des « canaux. » Depuis lors de multiples observateurs, tant en France qu’à l’étranger, et dont certains ont prouvé par ailleurs une haute valeur astronomique et rendu de vrais services à la science, ont confirmé et étendu la découverte de Schiaparelli. À la lunette, Mars offre immédiatement sur les autres grosses planètes observables (Vénus, Jupiter, etc.) un immense avantage : sa surface n’est pas comme la leur enveloppée d’une épaisse couche de nuages sans cesse en mouvement et qui empêchent de l’observer. En outre, l’atmosphère de Mars est certainement peu dense, comme le prouve le fait que lorsqu’une étoile est occultée par le disque de la planète, elle disparaît très soudainement derrière ce disque, ce qui n’aurait pas lieu si la lumière de l’étoile subissait une réfraction sensible dans l’atmosphère de Mars. Ces circonstances permettent d’observer avec beaucoup de netteté la surface de Mars et d’y distinguer un certain nombre de particularités topographiques observables à la fois visuellement et photographiquement et sur l’existence desquelles tous les astronomes sont d’accord. Du nombre sont les calottes polaires de Mars, toutes blanches comme celles du globe terrestre et probablement formées de glace ou de neige, et dont les dimensions varient suivant les saisons et l’intensité des rayons solaires. Ces calottes polaires qui s’étendent en hiver (il s’agit de l’hiver martien) jusqu’à une distance de 35 degrés du pôle (ce qui sur la terre correspondrait à peu près au centre de l’Angleterre ou au Danemark) sont à tel point diminuées quand la saison chaude s’avance qu’elles arrivent à disparaître complètement au fort de l’été martien. On a d’ailleurs émis diverses hypothèses sur la nature exacte de ces calottes polaires que certains ne croient pas être de la neige massive, que d’autres même attribuent à la neige carbonique provenant de la condensation du gaz carbonique qui serait abondant dans l’atmosphère de Mars. Ce n’est pas le lieu de discuter ces hypothèses.

En dehors des calottes polaires si caractéristiques avec leurs variations, toutes les observations manifestent à la surface de Mars des taches plus au moins foncées avec des zones ombrées de formes diverses dont la plus remarquable, qui se projette sur une zone plus