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n’est pas de grand pianiste qui ne doive s’astreindre à plaquer chaque jour quelques accords d’écolier.

Les ondes hertziennes sont aux ondes calorifiques ce que celles-ci sont aux ondes lumineuses, celles-ci aux ondes photographiques, celles-ci aux rayons X. Je m’explique.

Il est une chose que la grande entreprise de démolition commencée depuis quelques années par les physiciens a laissée à peu près intacte dans le monument élevé par la science du xixe siècle, c’est la théorie ondulatoire de la lumière. Il est, ou du moins il reste prouvé… jusqu’à nouvel ordre, que les rayons lumineux se propagent à travers un milieu qu’on appelle l’éther, et sous forme d’ondes analogues à celles qu’on produit dans une eau tranquille en y jetant une pierre.

Ce n’est pas le lieu d’insister sur les singulières propriétés dont jouit cet éther au point de vue de l’élasticité, de la pondérabilité, de la pénétrabilité. Contentons-nous de dire que cet éther des physiciens n’a aucune autre analogie que son nom avec l’éther vague, nébuleux et prosodique des poètes, et avec l’éther des pharmaciens, si précieux dans les syncopes romanesques des dames.

Ce qui est sûr, c’est qu’aucun savant, ou du moins presque aucun, — l’horrible gent des douleurs sévit, hélas ! partout, — ne doute de l’existence de cet éther qui remplit et pénètre partout l’univers dont il est la trame. Lord Kelvin, l’illustre physicien anglais dont la dalle funéraire est côte à côte avec celle de Newton à l’abbaye de Westminster, considérait l’existence de l’éther comme aussi bien prouvée que celle de l’air même que nous respirons, et comme non moins utile, puisque c’est l’éther qui nous transmet les rayons bienfaisants du soleil sans lesquels toute vie terrestre serait impossible.

Donc les rayons lumineux se propagent dans l’éther sous forme d’ondes, c’est-à-dire sont des ébranlements ondulatoires de l’éther, de même qu’un ébranlement produit à la surface d’une eau immobile y propage des ondes concentriques. Il y a cependant quelques différences ; l’une d’elles est que les ondes lumineuses se propagent infiniment plus vite que les « ronds » produits dans l’eau, puisqu’elles franchissent 300 000 kilomètres par seconde, ce qui est la plus grande vitesse connue en ce monde. Une autre différence est que la longueur de ces ondes lumineuses est très faible. Les ronds qui se propagent dans l’eau sont constitués par des petits sommets séparés par des dépressions, comme ceux qui constituent et celles qui séparent les vagues de la mer.