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front Nord, faisant face au Trentin, un angle trop ouvert. A cinq heures, le général Cadorna demande donc au général Foch de mettre à sa disposition une division française, pour la porter à Brescia et parer à une attaque débouchant par le Val Giudicaria. Opposé avec raison à l’idée de disperser nos unités, le général Foch réserve d’abord sa réponse. Mais, à sept heures, le général Cadorna le prie de lui donner une deuxième division pour la même région. Alors, afin de maintenir groupée notre 10e année, il est décidé d’un commun accord que deux de nos divisions débarqueront dans la région de Brescia et deux dans la région de Vérone. Des instructions en conséquence, révoquant les précédentes, sont envoyées dans la soirée du même jour au général Duchêne.

C’est donc à la demande du général Cadorna lui-même que le lieu de débarquement et de concentration de l’armée française, d’abord choisi à proximité de la ligne de la Piave, a été changé et reporté en arrière et vers le Nord, à proximité du Trentin. Et c’est en raison d’un danger prévu, par mesure d’urgente précaution, que ce changement a été apporté aux dispositions primitives. On voit par là ce qu’il faut penser de la thèse, d’après, laquelle le général Foch n’aurait « pas voulu compromettre ses troupes dans ce qu’il appelait une mêlée » et les aurait « maintenues entre l’Adige et le Mincio, » afin de les « disposer sur un front éloigné de toute gêne de l’ennemi. » Il n’y a rien de fondé dans ce reproche.

La seule chose à laquelle le général Foch se soit refusé, c’est à la dispersion des divisions d’une armée, qui tirait sa valeur de son homogénéité et à laquelle il importait de conserver, à ce moment, son individualité propre. Dissocier les divisions françaises, détacher l’une à droite, l’autre à gauche, eût été une faute, dont elles auraient pâti, sans profit appréciable pour les Italiens. C’eût été perdre l’avantage de leur cohésion et s’interdire de faire efficacement appel à elles, le moment venu. Mais à la seule condition qu’elles restassent groupées, le général Foch n’a nullement refusé de les faire intervenir, sur le point où le commandement italien le jugerait à propos, dans le délai nécessaire à leur débarquement et à leur concentration, qui ne pouvaient, bien entendu, s’opérer qu’en arrière du front. Le lieu primitivement choisi, d’accord entre le général Cadorna et lui, pour les débarquer et les concentrer, indique