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choisie et élue par les religieuses[1]. Le Roi était intervenu en sa faveur. Sainte-Glossinde était une trop riche abbaye pour que la Cour renonçât à une nomination, qui lui permettait de récompenser des serviteurs de son seul choix. Pour la troisième fois, le couvent messin se trouva aux mains de cette famille de Foix dont, depuis deux siècles, — dans le Sud-Ouest, toujours agité, du Royaume, — les membres besogneux et vaillants travaillaient pour le Roi de France avec un loyalisme profitable.

Toutefois l’intruse par le « fait du prince » avait eu d’excellents débuts. On se la représente telle à peu près que plus tard Bossuet peindra Anne de Gonzague : bonne petite fille, élevée depuis 1636 dans le couvent de Sainte-Marie de Saintes, sous l’aile d’une tante dévote, qui en est l’abbesse. La Contre-réformation catholique s’efforçait de réagir contre la décadence des Réguliers. Tandis que les Filles du sainte Thérèse viennent émerveiller la France, les docteurs augustiniens crient à l’épuration nécessaire. Louis XIII et Richelieu promettent d’y porter le bras séculier. A Verdun, le Père Didier de la Cour, à Gif, l’évêque Henry de Gondi parvenaient à réformer des Bénédictines relâchées. A Montmartre, Marie de Beauvilliers ; à Port-Royal, Angélique Arnauld ; à Saint-Paul-de-Beauvais, Madeleine d’Escoubleau de Sourdis ; au Val-de-Grâce, Marguerite d’Arbouze, d’autres encore, s’engageaient à qui mieux mieux dans ces voies de réforme. C’est dans ces bons sentiments que Louise arrive à Metz, flanquée de deux religieuses exemplaires que sa tante de Saintes lui avait données pour conseillères et chaperons.

Au commencement, dit l’auteur de la Gallia Christiana[2], elle fut pour la discipline tout feu, tout flamme, mena une vie des plus réglées et voulut l’imposer à ses nonnes. « Mais bientôt le joug lui parait dur. » Dévergondage personnel ? Rien ne l’indique. Et le chroniqueur protestant de Metz. Ancillon, tout en signalant les « étranges désordres » que Louise de Foix autorise, ne la flétrit point. C’est qu’en effet c’était moins vice que système. Nous n’avons pas plus les mémoires de l’abbesse, que ceux de Bossuet, dans le procès qui s’ensuivit. Mais les analyses que Floquet en donne, complétées par ce que nous savons d’elle, de ses entours et de ses contemporaines, nous renseignent, je pense, sur ses vues.

  1. Françoise de Lenoncourt.
  2. Gallia, XIII, col. 934.