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LA
CANONISATION DE JEANNE D’ARC

En 1911, je terminais mon livre sur Jeanne d’Arc par ces mots : « Nous ne sommes qu’à l’aube des temps qui verront s’accomplir indéfiniment sa mission. » Depuis lors, la guerre a évoqué, à chacune de ses heures tragiques, la figure de Jeanne d’Arc. A peine la guerre est-elle terminée, que le Saint-Siège, en proclamant et en célébrant la canonisation de Jeanne d’Arc, lui reconnaît une éternelle actualité. Jeanne d’Arc est vivante parmi les générations : elle devient désormais un sujet d’édification pour tous les catholiques comme elle est un sujet de méditation pour tous les hommes. Même en nous tenant à « l’humaine prudence, » — pour parler comme Jean Gerson, quand on lui soumit le problème de Jeanne d’Arc, — nous pouvons rappeler les paroles de cet homme de bon sens : « Il n’est ni impie, ni déraisonnable de penser que cette jeune fille est une envoyée de Dieu… Nous soutenons la cause juste ; faisons qu’elle mérite toujours d’être victorieuse… Faute de vertu, de foi, de reconnaissance, ne stérilisons pas ce miracle !… »

Le fait de la canonisation de Jeanne d’Arc, au moment où la France vient de passer par des angoisses pareilles à celles qui étreignaient le cœur de la « bonne Lorraine, » la proclamation des vertus de l’héroïne sous le dôme de Saint-Pierre, la pompe qui accompagna cette consécration, le concours immense des pèlerins et l’adhésion solennelle de toute la catholicité, l’ensemble de ces circonstances extraordinaires est incontestablement à l’honneur de notre pays et de l’idéal qui a toujours été le sien.

Essayons donc de fixer le souvenir de cette page de notre histoire et d’ajouter comme un nouveau chapitre à la biographie de Jeanne d’Arc : à l’exposé des quatre mystères de la