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française et les causes profondes de ses difficultés présentes. Je crois pouvoir résumer ainsi ce qui me fut dit :

— Nous sommes évidemment fatigués comme tout le monde, mais nos chevaux ont tout particulièrement souffert de la grande randonnée de Belgique, puis de la retraite et de la bataille de la Marne ; en ce moment, nous sommes réduits, faute de chevaux, à 40 sabres par escadron ; nous avons bien deux groupes automobiles, mais personne à mettre dedans. Il faudrait que l’armée nous donnât deux bataillons à cet usage. Nos groupes cyclistes ont subi des pertes effrayantes et sont réduits à 100 cyclistes par division… Vous me direz qu’aux trains régimentaires nous avons 60 cavaliers démontés par escadron ? C’est exact, mais ils ne sont ni armés ni équipés pour être employés en ce moment comme infanterie… Rappelez-vous qu’ils n’ont pas de baïonnette, et pas de sac !… Ajoutez enfin à tout cela que, par-dessus tout, nos cadres et nos hommes n’ont pas été instruits en vue de la nouvelle forme de guerre qui se trouve être imposée aujourd’hui à la cavalerie, et que ni dans notre organisation, ni dans notre dressage, ni dans notre armement, ni dans notre équipement, ni dans nos effectifs nous ne sommes « au point ; » ajoutez à cela que depuis deux mois, il ne se passe pas deux jours de suite sans que le commandement né nous demande de « nous sacrifier… » et que sans cesse « nous y sommes allés » et « y irons jusqu’au dernier. »

A 17 heures 30, je quittais le poste de commandement du général Conneau et je voulus aller en auto jusqu’à La Bassée voir le général Maistre, comme j’en avais reçu mission. Mais entre Sailly et Annequin, une panne me cloua sur place pendant deux heures… La route était jonchée de cadavres de chevaux ; de grandes lueurs d’incendie mêlées aux lueurs des départs illuminaient l’horizon vers Lens et Liévin.

Je pus cependant très tard me présenter à Béthune au général Maistre qui me dit que « l’attaque de la 13e division d’infanterie au Sud de La Bassée avait été retardée pour des raisons qui n’étaient pas encore précisées… » et vers 21 heures 30, je pus rejoindre à Saint-Pol le général de Maud’huy qui attendait mes renseignements pour achever l’ordre d’opérations ; pour le lendemain : rien n’avait réussi comme on l’avait espéré, ni l’attaque des chasseurs, ni celle de la cavalerie, ni celle de la