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Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 59.djvu/572

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moins funeste. Le petit séminaire était, en effet, dans beaucoup de diocèses, le principal et parfois l’unique asile de cet enseignement. A côté des enfants qui se destinaient au saint ministère, nous y élevions un plus grand nombre encore d’élèves destinés aux carrières civiles et aux professions libérales ! Les voilà sans abri ; et, dans l’impossibilité pour la plupart de quitter leurs familles pour suivre leurs maîtres, presque nécessairement livrés à l’enseignement rival qui souvent s’enrichit de nos dépouilles et s’élève sur nos ruines.

Je n’ai rien dit de nos grands séminaires, parce que le zèle de nos évêques, stimulé par une nécessité urgente, est parvenu, au prix des sacrifices les plus épuisants, à les reconstituer presque partout. Mais dans quelles conditions ? Souvent aussi déplorables que précaires : dans des locaux mal situés, loin de la ville épiscopale et de la surveillance immédiate de l’évêque, souvent trop étroits, impropres à la vie commune et régulière, au recueillement, à l’étude et à la discipline. Dans de telles conditions, beaucoup de nos grands séminaires, qui avaient été jusqu’ici la maison commune et familiale du clergé, le centre de ses réunions, l’asile aimé et recueilli de ses retraites, le refuge des séminaristes soldats à leurs heures de liberté, ont cessé de l’être, sans qu’il ait été possible à l’évêque d’y suppléer. C’est ainsi que, durant plusieurs années, plus du tiers des diocèses de France n’ont pu réunir leurs prêtres en retraites pastorales, faute de pouvoir les loger ; ceux-là seuls qui connaissent, par une expérience intime, la nécessité morale de ces retraites peuvent apprécier le dommage d’une pareille lacune.

La confiscation de nos menses, en même temps que nos séminaires et notre enseignement libre, a atteint plus ou moins gravement, selon les lieux, nos œuvres de persévérance et de propagande et très particulièrement nos œuvres de jeunesse qui sont notre meilleure, j’allais dire notre unique espérance. Les locaux qui les abritaient, les ressources dont elles vivaient, appartenaient fréquemment à nos menses diocésaines et paroissiales, et nous ont été ravies avec elles. Or, ceux qui ont l’expérience de ces œuvres savent que la suppression ou le changement de local, même quand on peut y suppléer, — ce qui parfois est impossible, — est toujours pour ces œuvres un coup sensible, et parfois mortel. Combien en ont été amoindries ou désorganisées !