et en outre, ils ont commencé à former eux-mêmes des troupes indigènes qui sont venues, sur les champs de bataille d’Europe, suppléer à l’insuffisance de nos contingents.
Les autres grandes Puissances européennes avaient naturellement été entraînées, comme la France, dans ce mouvement d’expansion. Bien que l’Angleterre eût hérité de la plus grande partie de notre vieil Empire, et qu’elle l’eût accru de possessions magnifiques, bien que les Indes, l’Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande, lui eussent déjà composé un incomparable domaine colonial, elle avait projeté de se réserver une portion de l’Afrique, de relier le Cap à la vallée du Nil et l’Est africain à l’Ouest. Il était inévitable que ces tentatives de pénétration simultanées et contradictoires eussent, à certaines heures, pour conséquences des rivalités et des dissentiments entre la Grande-Bretagne et nous ; et, en effet, à Madagascar, en Égypte, à Fachoda, et jusque sur le French Shore de Terre-Neuve, les prétentions des deux pays se heurtèrent parfois assez douloureusement. Mais l’esprit de conciliation et la loyauté des deux gouvernements dissipèrent vite ces malentendus et un jour vint où un règlement général de toutes les difficultés anciennes prépara les voies à l’entente et à l’amitié.
De son côté, l’Italie s’était, d’abord, inquiétée de nous voir en Tunisie. Elle trouvait que Rome avait plus de droits que la Gaule sur Carthage et que Bizerte était bien près de la Sicile. Elle nous fit assez longtemps sentir son mécontentement et se laissa entraîner dans l’orbite des Puissances centrales. Mais elle trouva, elle aussi, sa part en Érythrée et en Lybie et finit par signer avec nous, en 1912, un accord africain qui effaçait les dernières traces des divergences antérieures.
La Russie, dont les regards étaient attirés vers la Chine, la Perse et la Turquie, se désintéressait du partage de l’Afrique. L’Autriche-Hongrie, tournée vers les Balkans, n’avait pas d’ambitions coloniales. Mais l’Allemagne, dont la population croissante se trouvait à l’étroit dans l’Empire, et qui cherchait partout des débouchés pour son commerce, était bien résolue à s’en ménager dans le continent neuf où s’établissaient d’autres nations. Lorsqu’elle nous devança au Cameroun et au Togo, nous prîmes de bonne grâce notre parti de son voisinage, encore qu’il ne fût pas toujours sans désagrément ; mais elle laissa bientôt percer des desseins plus agressifs et, quoiqu’elle n’eût aucune ouverture sur la Méditerranée, elle éleva la prétention de devenir, à son tour, une Puissance méditerranéenne. Guillaume II