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11 heures du soir. Grâce aux précautions prises, les fugitifs arrivèrent sans encombre à bord de la Résolue. Quelques policiers grecs avaient bien tenté d’intervenir, mais il leur était impossible de distinguer les vrais marins des faux et les officiers grecs des véritables officiers de l’escadre. Ils en furent pour leur peine, car ils ne distinguèrent rien. Ils étaient déjà partis quand, sur l’ordre du Gouvernement royal, la troupe et la gendarmerie grecques vinrent garder les quais pour arrêter tout autre départ ; mais, pendant ce temps, la police grecque avait trouvé moyen de mettra sur la Résolue une garde de 20 hommes armés avec mission de s’opposer au départ du bateau. Averti par l’enseigne Barbier, le lieutenant de vaisseau, de Verthamon, se rendit à bord de l’Espéria avec 12 marins français armés ; à leur approche, tous les factionnaires grecs disparurent comme une volée de moineaux. Verthamon appareilla l’Espéria, le fit stopper devant la Résolue, où le transvasement des officiers de Verthamon et leurs bagages se fit à 1 heure du matin, et l’Esperia se dirigea vers le Pirée pour y recevoir Vénizélos.

C’était surtout celui-ci qui était surveillé et il fallut recourir à la ruse pour assurer son départ. Le 24 à 7 heures du soir, accompagné d’un Crétois, il partit de chez lui dans sa voiture et se rendit chez un de ses partisans, le capitaine de frégate Théocharis, où il dina. Après le dîner, on acheva de grimer un sosie qui, à 11 heures du soir, repartit ostensiblement dans la voiture de Vénizélos, rentra au domicile de ce dernier et y manifesta sa présence par tous les moyens possibles.

La même opération avait lieu en même temps pour l’amiral Coundouriotis qui, à cet effet, était venu avec un sosie dans la maison de son aide de camp, le lieutenant de vaisseau Voulgaris. Pour prévenir tout empêchement et en présence du déploiement de troupes grecques au Pirée, faisant craindre que l’éveil n’eût été donné et que le gouvernement royal ne s’opposât au départ de Vénizélos, on fit explorer la route de Phalère pour assurer la liberté des communications. Un automobile de la Légation d’Angleterre parcourait continuellement cette route où l’on avait, d’ailleurs, échelonné un certain nombre de gens armés qui, sur un signal de convention, devaient intervenir pour assurer le départ, si c’était nécessaire.

Sur le quai d’embarquement se trouve l’appontement du restaurant Platon, bien connu par les Athéniens comme un